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LA DERNIÈRE PLAIDOIRIE DE MAÎTRE

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Me Ousmane Sèye, un ténor du barreau du Sénégal qui officiait au sein du Cabinet d’avocats Seye & associés, vient de livrer sa dernière plaidoirie ce jeudi 9 mars au matin. Avocat inscrit en 1985 au barreau, la robe a, durant ses 38 ans d’expériences, plaidé de grandes affaires judiciaires fortement médiatisées.

Il était à cheval sur les dossiers impliquant des acteurs de la presse, mais aussi et surtout politiques. Ainsi, il a défendu, entre autres, les intérêts de journalistes et de groupes de presse au Sénégal. Sur son tableau de chasse, figurent en bonne place feu Babacar Touré et le groupe « Sud Communication » dans l’affaire Sud/Css, Abdou Latif Coulibaly, Madiambal Diagne, Yakham Mbaye, pour ne citer que ceux-là. D’ailleurs, entre Me Séye et la presse, c’est une histoire de destin manqué, notent des proches. En effet, lycéen, il côtoie les premières promotions du Cesti dont faisait partie un de ses oncles ; il s’initie aussi à la pratique en animant des journaux de lycée, en participant à des magazines littéraires comme, « Cénacle », animé par un certain Adama Gaye, nous raconte-t-on.

Les hommes politiques comme Me Abdoulaye Wade, Talla Sylla, Amath Dansokho, Landing Savané, entre autres, sans oublier le guide des Thiantacounes, Cheikh Béthio Thioune, dans l’affaire de Médinatoul Salam, et l’État du Sénégal dans beaucoup de dossiers, ont bénéficié de son assistance.

Il a été toujours considéré comme quelqu’un qui était dans le secret des dieux de l’État du Sénégal. Au cœur du système Wade, Me Seye a été de ceux qui ont désamorcé, en partie, la bombe « Idy-Wade », avec le dossier des chantiers de Thiès qui avait abouti au fameux protocole de Rebeuss. En quoi faisant ? En étant le plénipotentiaire du Président de la République dans les négociations avec son ancien Premier Ministre, qui a été emprisonné pendant sept mois, officiellement pour » atteinte à la sûreté de l’État ».

D’ailleurs, à propos de cette proximité avec le pouvoir en place, il a toujours soutenu : « je respecte tout pouvoir mis en place démocratiquement. Je ne m’oppose pas au Président de la République parce que je ne suis pas un opposant. Je suis un Avocat. Le régime me fait confiance. Je me suis engagé auprès du Chef de l’État par loyauté et par franchise ». Me Ousmane Sèye était aussi un homme politique. Il est le fondateur du front républicain, membre de la coalition Benno Bokk Yakaar. L’avocat en qui vibraient les thèses maoïstes sans être un militant encarté, occupait un poste de vice-présidence au Haut conseil des collectivités territoriales (Hcct). N’est-ce pas lui qui disait qu’il est temps de « réconcilier le citoyen avec la politique, de faire de la politique, la politike, un instrument entre les mains du citoyen pour son développement économique, social et culturel. Il est temps de réconcilier le citoyen avec la politique ».

Au sein de la grande famille du barreau sénégalais, Me Ousmane Sèye s’est toujours distingué par les grands dossiers à lui confiés, sa disponibilité à l’endroit de ses confrères, mais aussi et surtout vis-à-vis des journalistes. Il toujours accepté de partager ses connaissances du droit et son expériences pour éclairer les analyses des chroniqueurs judiciaires. Le témoignage de son jeune confrère Me Aboubakry Barro au micro de Emedia en est une preuve parfaite. « C’est un coup dur. On a perdu un confrère, un grand frère qui était respecté par tout le monde. C’est la famille judiciaire qui a perdu, mais aussi la République du Sénégal parce qu’il avait une casquette politique », a dit la robe noire. Et Me Barro de poursuivre : « l’homme était généreux. Il a toujours assisté ses confrères. À chaque fois que ses confrères ont eu des événements que ce soient douloureux ou des cérémonies de baptême ou de mariage il a été toujours présent. Il réconfortait tout le monde. Nous prions pour le repos de son âme. C’est très difficile et je n’ai pas les mots aujourd’hui pour exprimer ce que je ressens. Il fut un grand homme au plan du droit mais aussi au plan politique ».

Me Ousmane Seye s’était très tôt engagé dans le combat pour la défense des droits de l’Homme. Il est de ceux qui ont mis sur pied l’Organisation Nationale de défense des droits de l’homme (ONDH) dont il a assuré la Vice- Présidence.

Dans l’exercice de son métier, nombreux sont ses confrères qui le trouvent « excellent, bagarreur et teigneux ». « Ce qui est la marque des grands avocats », théorise ainsi Me Sall dans un post sur facebook. « La plus grande stratégie, c’est d’être teigneux, de ne jamais baisser la garde, d’aller jusqu’au bout. Ce n’est pas parce qu’on a perdu en instance ou en appel qu’on démissionne. Il fait partie des avocats qui ne démissionnent jamais lorsqu’ils estiment avoir raison. Il va jusqu’au bout de sa bagarre », disait-il.
À Dieu Maître !

M. THIOBANE

9 mars 2023


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