En cette veille d’élections présidentielles de 2024, le paysage politique sénégalais ne comporte que des hommes politiques et des mouvements, partis et coalitions politiques embrigadées dans des situations politiques qui les conduisent inéluctablement à l’échec électoral. Les schémas dans lesquels les candidats politiques se trouvent présentement constituent les pires scenarii qui font fatalement perdre, à un mouvement, un parti ou une coalition de partis politiques, toutes ses chances de remporter des élections présidentielles. Voici les 4 facteurs d’échec électorale qui caractérisent les candidats, mouvements, partis ou coalitions de partis politique qui se retrouvent, aujourd’hui, dans le champ politique sénégalais et qui sont en lice pour les élections présidentielles de 2024 :
De grands partis politiques sans grand homme politique
De grands hommes politiques sans grand parti politique
Des partis politiques moyens avec des hommes politiques moyens
Des hommes politiques anonymes avec des partis politiques anonymes
Pourtant malgré les facteurs d’échec que comporte chacune de ces situations, elles sont toutes défendues et même théorisées par les acteurs politiques ; selon qu’elles correspondent à leur cas. Chaque camp y va avec son idée fétiche et son slogan de génie pour plébisciter sa situation et espérer conjurer le sort. Alors que les acteurs politiques, du premier cas, se consolent en soutenant que les élections présidentielles sont la rencontre d’un homme politique et son projet avec le peuple, les acteurs politiques du deuxième cas se rassurent en estimant que les élections présidentielles sont la rencontre d’un parti politique et son programme avec le peuple, tandis que les acteurs politique du troisième cas veulent bien y croire en s’accrochant à l’idée selon laquelle, moins un homme politique fort ou un mouvement, parti ou coalition de partis politiques fort à la rencontre du peuple pour remporter les élections présidentielles, les élections présidentielles sont plutôt la rencontre d’un homme politique au niveau du peuple et d’un parti politique du niveau du peuple avec le peuple. Seul le dernier cas de figure, correspondant à la situation à des hommes politiques anonymes avec des partis politiques anonymes, n’est ni revendiquée ni assumée par aucun acteur politique alors qu’il compte pas mal de représentants dans la scène politique sénégalaise aujourd’hui, avec ses centaines de futurs candidats fantoches à avoir retiré des fiches de parrainage.
Mais, au-delà de toute leurre politique, la real politique nous a enseigné qu’au Sénégal les élections présidentielles ne se gagnent, en tout cas jusque-là, que si deux conditions sont nécessairement réunies chez le candidat. Pour être Président du Sénégal, il faut :
Etre un grand homme politique à la tête d’un grand parti politique.
Pour le numéro d’aujourd’hui, qui fait office d’introduction de ce dossier intitulé « Aucun des candidats en lice ne remportera les élections présidentielles de 2024 », il sera rappelé comment cette logique politique a, jusque-là permis, à chaque élection présidentielle, de fabriquer le Président de la République du Sénégal.
Un grand homme politique à la tête d’un grand parti politique pour gagner les élections présidentielles au Sénégal
L’histoire politique sénégalaise nous enseigne que pour remporter les élections présidentielles, aucune force politique ne peut se payer le luxe de ne compter, à la fois, sur un grand homme politique et sur un grand parti politique. Alors, la logique politique veut que pour espérer gagner les élections présidentielles au Sénégal, il faut un parti ancré dans le peuple et un homme en ancrage avec le peuple. Tous ceux qui ont présidé aux destinées du Sénégal, des indépendances jusqu’à aujourd’hui, ont réussi cette dialectique. Rappelons-nous, de manière très succincte, comment cette magie a opéré chez les 4 derniers présidents qui ont dirigé le Sénégal, au cas par cas.
Léopold Sédar Senghor :Un Président par la force du destin et par son machiavélisme politique
Dans l’imaginaire populaire du Sénégal, Léopold Sédar Senghor celui que le destin a imposé au peuple sénégalais. Ce Sérère un peu toubab, s’est malgré tout, profondément enraciné dans son terroir de Joal Fadiouth et s’est abreuvé à la culture sérère et sénégalaise. Il a incarné et il est l’incarnation du dialogue islamo-chrétien. C’est le chrétien qui a dirigé un pays à plus de 90% de musulmans et qui a été maintenu 19 ans au pouvoir par les marabouts. Dans le landernau politique sénégalais, Léopold Sédar Senghor restera le co-fondateur du Parti socialiste, premier et plus grand parti que le Sénégal n’a encore jamais connu. En fin politicien, il a réussi à écarter tous ses adversaires politiques dont Mamadou Dia, le plus redoutable, avec des armes politiques pas toujours conventionnelles. Il a appliqué la loi machiavélique qui stipule qu’en politique la fin justifie les moyens.
Abdou Diouf : Un Président par la force des chefs religieux et par son mentor politique
Dans l’imaginaire populaire du Sénégal, Abdou Diouf restera celui qui a été imposé au peuple sénégalais par son mentor le Président Senghor et qui s’est, aussi, imposé par sa taille physique, par sa trajectoire scolaire, par sa précocité professionnelle et par sa fidélité politique. Au moment de la toute puissance des Ndiguels au Sénégal, il a joué la carte des chefs religieux. La fidélité des jeunes non acquise à sa cause au profit de son opposant de l’époque, il s’est fidélisé la sympathie des Marabouts qui ont imposé à leurs fidèles une fidélité électorale à Abdou Diouf. Par ce système de la transitivité politique, il s’est retrouvé, par l’entremise des chefs religieux, porté par le peuple. Dans le landerneau politique, la fidélité de Abdou Diouf à son mentor lui a valu de recevoir l’héritage incontestable, bien que contesté, du grand Parti socialiste. Avec cerise sur le gâteau et, fait inédit dans l’histoire politique sénégalaise, le fait de recevoir sur le plat l’héritage du pouvoir présidentiel sans avoir à combattre champ dans le champ de bataille politique pour l’acquérir. Ce qui rappelle dans l’histoire royale cette race de d’héritiers qui acquis le pouvoir et la gloire sans avoir à conquérir et pour qui on peut chanter ou déchanter ce trisyllabe : Vaincre sans péril.
Abdoulaye Wade : Un Président par la force du peuple et par son génie politique
Dans l’imaginaire populaire du Sénégal, Abdoulaye Wade restera celui que le peuple sénégalais s’est imposé à lui-même. En 1974, des enfants sont nés avec le PDS, ils ont grandi avec le PDS, ils devenus responsables avec le PDS, ils ont acquis la maturité politique avec le PDS avant de porter, à leur vingt-septième année, Abdoulaye Wade au pouvoir. Ce peuple a Abdoulaye Wade, avec qui il a contracté un pacte de sang, dans son ADN. Dans le landerneau politique sénégalais, le PDS restera comme le premier parti politique de contribution puis d’opposition reconnu du Sénégal, grâce au génie politique de Laye Ndiombor que lui avaient même reconnu ses adversaires. D’ailleurs, contribution et opposition ont rythmé sa stratégie politique qui l’a amené à entrer aux gouvernements quand il le fallait et à sortir quand il fallait pour aller s’opposer. Un jeu de ruse politique qui l’a amené paisiblement jusqu’au pouvoir quand l’heure est venue. Chez Abdoulaye, la devise a été que : Rien ne sert de courir, il faut partir à point.
Macky Sall : Un président par la force de l’endurance et par sa tactique politique
Dans l’imaginaire populaire du Sénégal, Macky Sall restera celui qui s’est imposé au peuple sénégalais. Pendant longtemps dans l’ombre d’un mentor et d’un parti, il a su se partir pour sous les coups de l’acharnement et refuser l’humiliation. Avec son statut de victime et armé de son endurance, il est parti à la rencontre des sénégalais pour se faire connaître et leur faire connaître son parti naissant. Par un périple historique dans les annales politiques du sénégalais. il n y a pas de régions, de départements, d’arrondissements, de communautés rurales, de quartiers, de villages, de hameaux, que l’homme politique n’a parcouru, découvert, visité, séjourné… Comme gain politique, Voilà l’homme du régime en ses qualités de Directeur général, Ministre, Premier Ministre, Président de l’Assemblée nationale, qui avait écoeuré les sénégalais devenir, avec son statut de victime et après contact avec le peuple, un nouveau Macky au cœur du peuple et le parti APR dans les cœurs des sénégalais jusqu’au Palais.
Présentement, aucun des candidats et aucun des mouvements, partis ou coalitions de partis politiques, en compétition pour les présidentielles de 2024, ne remplit ce dyptique gagnant. Au mieux, ils n’ont que l’un ou ils n’ont que l’autre et, au pire, ils ont, à moitié, l’un et, à moitié, l’autre ou ils n’ont ni l’un ni l’autre. Dans cette configuration, le risque que court le Sénégal est, qu’au soir des élections présidentielles de 2024, aucun des candidats, mouvements, partis ou coalitions de partis politiques, en lice, ne sorte gagnant de la compétition électorale. Alors le Sénégal sera, par la médiocrité de ce champ politique et des acteurs politiques qui le composent, le seul grand perdant !
El Hadji Mouhamadou Fadilou Diallo BA
Dr en sciences de l’information et de la communication de l’Université d’Aix-Marseille
Spécialiste en communication politique, sociale, territoriale, organisationnelle
Expert CEDEAO en Communication-Journalisme
Enseignant-Chercheur à l’ESEA ex ENEA
Votre analyse est pertinente si on l’inscrit dans le contexte d’une victoire au 1er tour . Nous pensons que dans une compétition électorale y a forcément un gagnant et ce dernier n’est personne d’autre que celui a été choisi par la majorité des électeurs . C’est peut – être qu’ après la victoire qu’on parlera peut-être de grand homme politique avec « une grande coalition de partis politiques » qui a remplit le dyptique gagnant .
Cette échéance électorale s’inscrit dans un contexte politique très particulière et nous présentera un candidat vainqueur assez particulier dont le profil differerait de ceux que nous avions connu jusque là. Et le peuple qui l’a porté au pouvoir sera l’unique vainqueur