Le Plan Sénégal émergent devait être le cadre de référence de nos politiques publiques jusqu’en 2035 pour atteindre l’émergence. Mais avec la troisième alternance, vient un nouveau référentiel de politique économique et sociale, « le Projet », un projet de transformation systémique. Invité de l’émission Jury du Dimanche sur les ondes de la 90.3 Iradio, Mouhamadou Madana Kane, Banquier et leader du Mouvement DUNDU ne trouve pas cohérent ce changement de référentiel. Cependant, note-t-il : « je le trouve normal, oui, parce que c’est un nouveau gouvernement qui a prôné la rupture. Donc, quand on parle de rupture par rapport à quelque chose qui existait, ça veut dire que, naturellement, on amène quelque chose de nouveau. Donc, du point de vue de la normalité, oui, parce que c’est une alternance. Quand on fait une alternance, on vient, on propose aux populations un nouveau programme, les populations l’adoptent, elles vous élisent, et en ce moment, on peut trouver que ce soit normal. Cohérent, c’est un mot trop dur, parce que je pense que les visions ne sont pas les mêmes. On a, dans le cadre du Plan Sénégal émergent, une vision axée principalement sur le rattrapage infrastructurel et le changement des fondamentaux économiques qui était plus ou moins extraverti. L’économie, dans le cadre du PSE, était plus ou moins un modèle économique extraverti.
Ici, on a un projet axé sur trois leviers : un Sénégal souverain, prospère et juste », soutient-il.
Alors, dans le projet, il est prévu une rationalisation des dispositifs existants comme la BNDE, le Fonsis, le Fongip et la DER par la création d’une banque publique d’investissement. Est-ce que la mise en place de cette banque pourrait contribuer à améliorer le paysage économique et financier de notre pays ? Pour répondre à cette question, l’invité du Jury du Dimanche dira que : « l’idée, elle est bonne parce qu’on veut rationaliser. Mais je dis que dans la rationalisation, il ne faut pas occulter les contraintes réglementaires. Parce qu’une banque, on ne s’appelle pas banque sans être assujettie à certaines réglementations, sans être assujettie à certaines contraintes de ratio et autres. Or, l’État a besoin de lier ses mains pour pouvoir faire ce qu’il a envie de faire et pouvoir agir sur l’économie. Vous ne pouvez pas le faire en tant qu’État si vous êtes une banque assujettie à la réglementation bancaire. Je pense que c’était d’ailleurs le sens d’avoir créé le Fonsis, le Fongip. C’est justement pour sortir du giron de la réglementation bancaire. Donc ça, je serais d’avis ou mon conseil serait de bien analyser la question par rapport aux objectifs que l’État s’est fixé d’avoir. Parce que l’État ici est interventionniste. On l’a vu dans le programme que l’État veut être interventionniste. Quand vous voulez être interventionniste, vous avez intérêt à ne pas avoir les mains liées. Or, vous risquez d’avoir les mains liées si vous regroupez tout ça dans une banque assujettie à la réglementation. Les instruments qui existent n’ont pas les mêmes vocations.
Et donc, il faut trouver l’équilibre qu’il faut pour que tout ce qui est banque commerciale puisse rester rationalisé, rester une banque commerciale. Et tout ce qui est instrument d’intervention de l’État, qu’on puisse peut-être le gérer à travers d’autres mécanismes qui peuvent également être rationalisés. Donc, il serait plus judicieux de garder le Fonsis, le Fongip en créant une caisse, une grande caisse d’aide à l’emploi et à la productivité ».
Cheikh Moussa SARR et Pape Doudou DIALLO ( Photo)