Le Sénégal dispose pour de vrai du pétrole. Magnifique opportunité que la providence a mise dans les entrailles de notre bonne terre. Dans cette grande Afrique résiliente après avoir été atrocement saccagée par esclavagistes et colons, ce petit pays qui est le nôtre a dû rencontrer dans son cheminement une bonne étoile qui a tissé son destin. Le peuple qui l’habite a eu cette intelligence que beaucoup d’autres sur le continent n’ont pas toujours eue de préserver la stabilité et la cohésion domestiques comme la prunelle de ses yeux. On n’en croit pas encore nos yeux mais la plus grosse nouvelle qui nous soit arrivée depuis longtemps découle de ces gouttes de pétrole qui ont jailli de l’embouchure de Sangomar. Dans «Terre des Hommes», Saint-Exupéry a fait une évocation de l’eau comme s’il parlait à un être vivant. «Avec toi, disait-il, rentrent en nous tous les pouvoirs auxquels nous avions renoncé. Tu es une ombrageuse divinité». De cet autre liquide précieux sans être vital mais autrement plus stratégique, il est loisible d’en dire autant. Toute civilisation qui en découvre sur son sol ou dans ses fonds marins possède un avantage comparatif décisif sur les autres. On n’est plus seulement sur la carte du monde. On figure en son centre. Mais toute nouvelle donne doit donner à beaucoup réfléchir sur les dessous de cartes. Elle pose des défis redoutables. Pour tous ceux qui ont entre leurs mains périssables et leurs frêles épaules cette énergie de référence rare, une vigilance de tous les instants s’impose. Elle doit être intraitable.
Tout donner à la jeunesse
La première mesure d’accompagnement face à la nouveauté est l’accroissement de la sécurité et de la sûreté sur chaque portion du territoire national. Il faut de la tolérance zéro dans un pays qui n’est plus tout à fait le même. En la matière, le Sénégal a de qui tenir. L’Arabie Saoudite par exemple est une destination privilégiée pour faire du benchmark. 3ème plus grosse productrice mondiale, la pétromonarchie est aussi redoutable en négociation qu’en prévention. Elle ne laisse rien passer qui nuise à ses intérêts supérieurs à tel point qu’on peut y entendre les mouches voler. Sans verticalité ni autorité en effet, aucune quiétude n’est possible quand on a ce type de ressources que tout le monde convoite. Le nom du lion est le gardien de son jardin, dit l’adage. Pour nous autres, il y a donc un avant et un après. Comme chez les Saoudiens, les revenus du pétrole doivent être déversés en priorité dans l’éducation, la formation, la culture. Tout donner à la jeunesse qu’il faut armer de sciences jusqu’aux dents et surtout désintoxiquer du folklore qui la retarde énormément quand le reste du monde est branché aux algorithmes et à l’intelligence artificielle.
Tous les secteurs de la vie sont malades
Les pétrodollars du Golfe persique sont destinés avant toute chose au capital humain qui ne vit plus dans ces contrées d’expédients mais d’expériences fantastiques. Figurez-vous qu’avant de devenir l’oasis qu’elle est aujourd’hui, l’Arabie n’était qu’un désert hostile. Les pèlerins effectuant le grand voyage à la Mecque dormaient à l’époque à la belle étoile et s’empiffraient d’eau de frugales bouillies de riz. Que c’est bien loin ces temps austères. Les revenus du pétrole ont servi là-bas à quelque chose. Les retombées se voient même les yeux fermés. Il doit en être de même pour le Sénégal. Ce pays si proche du paradis mais qui poursuit étonnamment sa descente aux enfers. Tous les secteurs de la vie y sont malades d’une succession et d’un enchaînement de mauvais choix et d’incompétence. C’est simple comme tout. Le but premier du pétrole, c’est de jouer un rôle dans la vie des gens, pour qui tout est urgent et déprimant.
Par Assane GUÈYE