Le journal Le Quotidien s’était déjà interrogé sur l’intention du Premier ministre qui marque le pas dans sa Déclaration de politique générale. La sortie de Abdou Sané, un très proche de Sonko, vient en rajouter à un doute ou une sonde (?) sur une Dpg reportée sine die. Et le pouvoir pourrait brandir un argument qui fait débat sur le Règlement intérieur de l’Assemblée dont la version officielle n’engagerait plus la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale après sa modification. En avril dernier, Pr Meissa Diakhaté alertait sur cette question dans une contribution intitulée «Le Premier ministre tient la montre en matière de Déclaration de politique générale». Lors de l’émission Sen Show de la Sen TV, reprise par Senegal7 en octobre 2022, Doudou Wade avait estimé que ce Règlement intérieur 2021 était «une falsification de la loi» parce que comportant «des dispositions qui ont été déjà enlevées par la loi organique 2019». Il avait demandé d’ailleurs à tous les députés d’enquêter sur les auteurs de cette «forfaiture».
«La version officielle du Règlement intérieur n’engage plus la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée»
«A la lecture des dispositions précitées (article 55 de la Constitution), le Premier ministre n’est plus enfermé dans un délai pour se soumettre à la déclaration de politique générale. Il lui appartient d’en déterminer le meilleur moment, certainement dans la limite d’un délai raisonnable. Cela pourrait intervenir même au-delà de juin 2024. Selon la rédaction initiale de la loi n° 2002-20 du 15 mai 2002 portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, dernier alinéa de l’article 98 : ‘’La déclaration de politique générale doit intervenir au plus tard trois (03) mois après l’entrée en fonction du Gouvernement. L’Assemblée nationale doit en être informée huit (08) jours au moins avant la date retenue’’. Par la loi n° 2019-14 du 28 octobre 2019 modifiant et complétant la loi organique n° 2002-20 du 15 mai 2002 portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale (Rian), modifiée, l’Assemblée nationale a abrogé, tirant les conséquences de la suppression du poste de Premier ministre en 2019, l’article 97 (Chapitre 22 : Déclaration de Politique générale), l’article 98 (Chapitre 23 : Questions de confiance) et l’article 99 (Chapitre 24 : Motion de censure) de sorte que la version officielle du Rian ne comporte plus aujourd’hui de dispositions concernant l’engagement de la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale. Comment cela a-t-il pu se réaliser ? S’agit-il d’un oubli en dépit du retour du poste de Premier ministre ? A ce propos, on peut comprendre pourquoi au début de la XIV Législature, des députés ont tenté, en dehors de la procédure constitutionnellement fixée, de modifier le règlement intérieur qui est pourtant une loi organique.»
«Le Pm détient un privilège en matière de procédure législative»
«En plus de contrôler le délai, le Premier ministre détient, au titre de l’article 85 de la Constitution, un privilège en matière de procédure législative. Ainsi, ‘’l’inscription, par priorité, à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale d’un projet ou d’une proposition de loi ou d’une déclaration de politique générale, est de droit si le Président de la République ou le Premier ministre en fait la demande’’. Mieux pour le ‘’nouveau’’ Gouvernement, ‘’une motion de censure ne peut être déposée au cours de la même session’’. D’où, l’intérêt de tenir la déclaration de politique générale au-delà de la session ordinaire unique 2023-2024 dont la clôture est prévue le 30 juin 2024. A coup sûr, cela éviterait à l’actuel Gouvernement d’essuyer une seconde motion de censure durant la prochaine session ordinaire unique (2024-2025). Bien plus, l’opposition, présentement majoritaire à l’Assemblée nationale, aura sans doute l’intelligence de ne pas renverser le Gouvernement à une date qui lui sera également fatale. Car en mi-septembre 2024, soit à l’expiration des ‘’deux premières années de la législature’’, ‘’le Président de la République peut, après avoir recueilli l’avis du Premier ministre et celui du Président de l’Assemblée nationale, prononcer, par décret, la dissolution de l’Assemblée nationale (…). Le décret de dissolution fixe la date du scrutin pour l’élection des députés. Le scrutin a lieu soixante (60) jours au moins et quatre-vingt-dix (90) jours au plus après la date de publication dudit décret».
Malick SY