Les ministres de l’Environnement et de la Transition Écologique, Abdourahmane Diouf, et de l’Hydraulique et de l’Assainissement, Cheikh Tidiane Dièye, ont visité les lacs Wouy, Thiourour et Warouway pour mesurer la vulnérabilité de ces zones humides essentielles à la régulation des eaux pluviales. Entre occupation irrégulière des berges, pollution et avancée des habitations, ces écosystèmes, qui protègent les populations contre les inondations, sont aujourd’hui fortement compromis. Une réunion d’urgence au METE doit définir les mesures à prendre.
Ce week-end, les ministres Abdourahmane Diouf (METE) et Cheikh Tidiane Dièye (Hydraulique et Assainissement) se sont rendus sur plusieurs sites lacustres — Wouy, Thiourour et Warouway — pour constater l’état avancé de dégradation de ces milieux. Selon les observations faites avec l’Office des lacs et cours d’eau, l’équilibre écologique de ces milieux est menacé par une combinaison de pollution, d’occupation anarchique des berges et d’activités anthropiques non maîtrisées.
Les images et constats recueillis parlent d’eux-mêmes : cours d’eau en eau sombre et chargée, espaces naturels grignotés par des constructions, déchets en périphérie, et disparition progressive du plan d’eau. Un diagnostic qui sera soumis, à une réunion technique au METE pour décider des interventions prioritaires.
Les évaluations menées par le ministère de l’Hydraulique, en collaboration avec l’Office des lacs et cours d’eau, montrent qu’entre 2005 et 2025 le lac Thiourouré a perdu environ 5 hectares de surface aquatique au profit d’occupations irrégulières. Ce recul, même limité en apparence, fragilise le rôle régulateur des lacs et augmente la vulnérabilité des quartiers riverains aux inondations.
Les lacs visités sont interconnectés et fonctionnent comme un système de vases communicants : ils recueillent les eaux de ruissellement, contribuent à réguler la température locale et amortissent les crues lors des fortes pluies. Leur artificialisation ou leur comblement déplace les eaux vers d’autres zones, accentuant le risque d’inondations et de crises sanitaires.
Abdourahmane Diouf a rappelé la responsabilité partagée entre l’État et les citoyens : « C’est la nature qui est censée nous faire vivre, mais ce sont les hommes et les femmes du Sénégal qui l’agressent au point qu’elle ne peut plus nous donner ce dont nous avons besoin. » Il a insisté sur la nécessité de rendre les écosystèmes viables pour permettre « à nos populations de vivre dans un environnement sain » et sur le rôle de l’État pour protéger les citoyens « contre eux-mêmes ».
De son côté, Cheikh Tidiane Dièye a souligné l’impact concret des occupations irrégulières : « Nous avons déjà perdu, entre 2005 et 2025, 5 hectares sur le Lac Thiourouré à cause de l’occupation irrégulière. » Il a ajouté que tant que les phénomènes anthropiques persistent, les actions ponctuelles de l’État pour lutter contre les inondations resteront insuffisantes, appelant à une « approche intégrée » et à la mutualisation des services publics pour mettre en place « des dispositifs renforcés ».
Conséquences pour les populations
Augmentation du risque d’inondation dans les quartiers riverains.
Dégradation de la qualité de l’eau (risques sanitaires).
Perte d’espaces de vie et de respiration urbaine.
Diminution de la capacité d’absorption des eaux pluviales, avec coûts humains et économiques lors d’épisodes climatiques extrêmes.
La réunion prévue au METE doit permettre d’adopter des mesures rapides et structurantes. Parmi les priorités évoquées, certaines déjà suggérées par les ministres, figurent :
Protection et remise en état des berges : démarchage et dégagement des occupations illégales, délimitation et marquage des zones protégées.
Restauration écologique : curage ciblé, replantation de ripisylves et réhabilitation des franges lacustres.
Renforcement du contrôle et de la réglementation : sanctions administratives et judiciaires contre l’occupation illicite, renforcement de la coordination entre collectivités locales, METE et ministère de l’Hydraulique.
Gestion intégrée des bassins versants : planification des ruissellements et création de zones tampons pour absorber les crues.
Campagnes de sensibilisation : mobilisation des populations riveraines sur la préservation des lacs et les comportements à adopter pour réduire les risques.
Systèmes de surveillance : inventaire régulier des superficies lacustres, monitoring hydrologique et cartographie des occupations.
Gestion des déchets et assainissement : actions pour réduire la pollution liquide et solide qui détériore la qualité des cours d’eau.
Les ministres ont insisté sur la dimension citoyenne de la protection des écosystèmes : « Si les populations prennent en charge ces milieux, elles le font pour elles-mêmes et pour les générations à venir », a rappelé M. Diouf. Au-delà des mesures étatiques, la pérennité des lacs dépendra d’un engagement collectif et d’un changement de comportement à la base.
Le communiqué officiel du METE et les conclusions de la réunion technique, attendus dans les prochains jours, préciseront le calendrier d’intervention et les budgets alloués. Pour l’heure, le message est clair : sans action coordonnée, ces lacs, poumons naturels et régulateurs hydrauliques, continueront de perdre du terrain, au péril des populations qu’ils sont censés protéger.
Mamadou Lamine FATY