À l’issue de la première édition de la cérémonie de récompense des meilleurs élèves organisée en 2024, une situation alarmante a été mise en lumière : plus de 200 enfants non déclarés à l’état civil, parmi lesquels figuraient même des élèves primés. Ce constat a secoué les consciences locales et poussé les membres de la génération 80-85, dont Édouard Diouf, à agir.
« Un enfant sans extrait de naissance est un apatride. Il n’est ni Sénégalais, ni Guinéen, ni Malien. Il n’a aucune nationalité », alerte Edouard Diouf. Face à cette réalité, la nécessité de déclarer les enfants à l’état civil s’impose comme une urgence. Les localités les plus touchées identifiées lors de la première édition incluent Elinkine, mais aussi les villages voisins de Kagnout et de Mlomp, où des cas similaires ont été recensés dans les écoles primaires et secondaires.
Pour faire face à cette situation, plusieurs leviers ont été activés. Le premier : la sensibilisation. « Nous pensons que les parents n’ont pas déclaré leurs enfants non pas par refus, mais par ignorance », affirme Edouard Diouf. L’enjeu est crucial : sans extrait de naissance, l’enfant ne peut accéder aux soins de santé, à l’éducation, ni à aucun service public.
Le deuxième levier repose sur la mobilisation des autorités. L’acte de naissance étant une obligation légale, le non-respect de cette exigence pourrait nécessiter l’intervention de l’autorité judiciaire. C’est pourquoi les organisateurs ont associé le tribunal de de Ziguinchor, la mairie, les inspections d’académie et les structures de santé à leur démarche.
Outre la sensibilisation, l’initiative a également récompensé l’excellence scolaire. À Elinkine, 16 élèves des différentes écoles – publiques et privées – ont été primés, tout comme à Kagnoute et à Mlomp, où 12 élèves issus de Mlomp 1 et Mlomp 2 ont été distingués.
Cherif Chamsidine Sarr, directeur de la Fondation Khaléyi, partenaire clé du projet, rappelle que « le développement d’un terroir doit être porté par ses fils ». Avec les jeunes cadres locaux, la Fondation a initié le projet Horizon 2026 dont l’ambition est claire : zéro cas d’abandon scolaire dû aux grossesses précoces et au défaut de déclaration à l’état civil.
Une équipe dédiée sillonne les villages de la région pour recenser, informer et accompagner les familles, en collaboration avec les écoles et les autorités locales. « Sans pièce d’état civil, un enfant n’existe pas légalement. Nos parents pouvaient vivre sans, mais ce n’est plus possible aujourd’hui. Pour étudier, voyager ou même recevoir de l’argent, une pièce d’identité est indispensable », souligne Cherif Chamsidine Sarr.
À noter que cette mobilisation locale trouve un écho national. Le gouvernement sénégalais a récemment annoncé des mesures fortes, dont la gratuité de l’établissement des pièces d’état civil à travers le pays, dans le cadre de sa politique d’éradication de ce phénomène.
Emedia