Dans la société arabe, la femme était rarement considérée au-delà de son rôle de mère et d’épouse. Veuve et mère, Khadija était aussi et surtout une femme d’affaires prospère, respectée et généreuse. Née dans une famille de commerçants, elle va hériter des caravanes de son défunt père. Plutôt que de se contenter de cette richesse qui lui aurait largement suffi, elle va s’investir à faire fructifier son héritage. Sa pratique des affaires sera doublement essentielle à la future foi islamique : Son éthique dans le business va servir d’inspiration et d’autre part, elle soutient financièrement le Prophète (Psl) et va aider les musulmans déshérités ou victimes de persécutions.
Pionnière de la finance islamique
Né orphelin et élevé par Abu Talib, le plus démuni de ses oncles, le Prophète avait des moyens limités. Il commence donc à travailler dès l’adolescence et finit par se mettre au service de Khadija. C’est le début d’un partenariat qui va changer le monde. Le commerce caravanier vers la Syrie et le Yémen était la principale activité économique à La Mecque. Généralement, cette activité mettait en relation deux parties : Le propriétaire de la caravane et la personne engagée pour la conduire et écouler la marchandise. Le premier contribue par ses biens tandis que le second contribue par son labeur. S’il y a des bénéfices, ils sont répartis entre les deux. S’il y a des per- tes, elles seront seulement assumées par le propriétaire. On considère le labeur non rémunéré de l’associé comme sa façon d’assumer les pertes. Cette forme de collaboration est appelée Moudaraba et elle est aujourd’hui l’un des piliers de la finance islamique moderne. Les banques islamiques n’appliquant pas l’intérêt, elles réalisent une partie de leurs bénéfices en finançant des projets. Si ces derniers génèrent des revenus, ils sont partagés entre la banque et le porteur de projet. Dans le cas contraire, la banque assume les pertes tandis que l’entrepreneur n’engrange aucun bénéfice. C’est ce partenariat qui liait le Prophète à Khadija avant le mariage.
Bienfaitrice des premiers musulmans
Lorsque Khadija a proposé le mariage au Prophète, il était réticent car n’ayant pas encore les moyens de prendre et de s’occuper d’une épouse. Des réticences qui seront finalement levées par Khadija qui va, pour la première fois, mettre le Prophète à l’abri du besoin. A partir de ce moment, le Prophète pouvait consacrer une partie de son temps à ses retraites spirituelles qui vont aboutir à sa prophétie quinze ans après le mariage. Outre le commerce, la Mecque vivait du pèlerinage polythéiste.
L’appel au monothéisme du Prophète était donc une mauvaise nouvelle pour les affaires. De puissants et riches clans se liguèrent contre la jeune communauté musulmane. Les adeptes de la nouvelle foi étaient soumis à un sévère boycott social et économique tandis que les esclaves convertis étaient torturés. Khadija va utiliser sa fortune pour nourrir les musulmans et affranchir des esclaves. Sa fortune a été essentielle pour l’avènement et la survie de l’Islam. La façon dont elle a été acquise puis employée est aujourd’hui une source d’inspiration pour des millions de musulmans qui ont recours à la finance islamique et pratiquent à la charité.
Comprendre la finance islamique
Comment réaliser des profits tout en se conformant à la charia ? Telle est l’essence de la finance islamique. La charia (loi islamique) interdit la pratique du riba (biens gagnés de façon indue). L’intérêt est considéré comme du riba parce que celui qui place son argent dans une banque en gagne davantage sans fournir le moindre effort tandis que la per- sonne qui emprunte pour travailler devra payer plus. L’islam voit l’intérêt comme un moyen d’enrichir les plus riches et de pénaliser les démunis. Pour générer des revenus, les banques islamiques optent pour d’autres stratégies dont voici les plus répandues. Non seulement ces stratégies permettent de contourner l’intérêt mais elles contribuent à la création de valeurs et à une meilleure répartition des revenus.
Mudarabah : Stratégie dans laquelle, la banque finance un projet qui sera exécuté par un partenaire fiable. Les bénéfices sont répartis entre les parties impliquées tandis que les pertes seront seulement assumées par la banque.
Muraabah : C’est une alternative au prêt d’argent avec intérêts. Un moyen pour la banque islamique de gagner de l’argent lors d’un prêt consiste à acheter le bien que souhaite acquérir le client et de le lui céder à un prix qui inclut un profit pour la banque.
Sukuk : c’est la version islamique des emprunts obligataires. Dans la finance classique, lorsque l’État souhaite construire une infrastructure, celle-ci peut être financée par un système de prêts participatifs. L’argent emprunté sera remboursé avec intérêts.
Dans la finance islamique, l’infrastructure construite appartient à ceux qui ont participé à son finance- ment et les bénéfices générés sont répartis entre eux.
Waqf : Ce sont des dons destinés à une œuvre d’utilité publique comme une mosquée, une école, un hôpital, etc. Alors que la Zakat est obligatoire pour tout musulman, le waqf ne l’est pas. Il demeure cependant une action méritoire qui contribue à l’avancée spirituelle du bienfaiteur et au développement de la communauté qui reçoit.