Devant le Jdd, dimanche 19 novembre, le co-auteur de l’ouvrage « Les territoires du développement », Moussa Balla Fofana estime que l’acte 3 de la décentralisation, lancé en 2013, est un échec. « Dix ans après, ils ont mis de côté tout ce que les sciences de l’aménagement du territoire devaient nous apprendre, tout ce que les Sciences des politiques publiques nous ont démontré quand on décentralise, on responsabilise les communautés. Ils ont mis de côté tout ce que la fiscalité locale devait apporter. Ils ont mis de côté ces fondements (selon lesquels) c’est depuis les territoires qu’on pense le développement », justifie-t-il, arguant « qu’il ont mis de côté tout ça pour faire de la politique politicienne. »
Aussi, soutient l’opposant et membre de l’ex-parti Pastef, la décentralisation se résume pour le Président Macky Sall à cette question : « Est-ce que vous êtes un maire de Benno ou un maire de l’opposition ? »
Il ajoute : « Quand Macky Sall est arrivé au pouvoir, il y avait encore les régions. Il a fait disparaître les régions alors que les régions sont les paliers de gouvernance le plus stratégique quand on parle de décentralisation. C’est le niveau où l’on fait la planification du territoire, la planification économique, où on réfléchit sur l’environnement, sur les ressources. Macky Sall a balayé ça pour penser que c’est avec un département qu’on réfléchit sur le développement. Qu’est-ce que les départements représentent dans la culture, la sociologie et l’histoire du peuple sénégalais ? Rien du tout. »
Avant de souligner : « Aujourd’hui, si vous voulez invoquer l’histoire, la sociologie, l’économie, même la géographie, et que vous voulez analyser comment est composé nos 196 712 km2, vous comprendrez qu’il y a un territoire qui s’appelle la Casamance, qui a des spécificités d’un point de vue politique, économique, et sur lesquels on peut bâtir un premier moteur. Il y a le Sine Saloum, qui a ses particuliers, Dakar Thiès, Walo, le Boundou, le Centre, le Baol. Voilà les moteurs de nos territoires, (autour desquels) nous devons fédérer aujourd’hui nos énergies, leur donner suffisamment de ressources, et les accompagner à comment planifier l’aménagement de ces territoires, la politique de la ruralité, les questions de protection de l’environnement. Quels sont les investissements importants ? Comment exploiter l’or au niveau du Boundou ? Voilà les vrais débats et jusqu’où on peut aller avec la décentralisation. »
La preuve, dit-il, que c’est « un échec » : « Quand Macky Sall est arrivé, le budget pour la décentralisation, c’était 2 à 3%. » À l’en croire, ces pourcentages « n’ont pas évolué. » « Pourtant, les pays émergents mettent 35%. Les pays développés sont à 50% du budget. Dans un pays où tout est priorité, il faut choisir les axes stratégiques. Si la décentralisation permet d’avoir un impact direct sur la santé, l’éducation, la sécurité, l’économie », déclare-t-il.
Dié BA et Abdoulaye SYLLA (Photo)