“Liberté”, scandent des Gabonais. Ce cri résonne jusqu’à Dakar, la capitale sénégalaise, après que l’Armée a pris le pouvoir au Gabon, annulant les résultats de l’élection présidentielle de samedi dernier, 26 août.
Investi président le 16 août 2009, après la mort de son père, Omar Bongo, deuxième président du Gabon de 1967 à 2009, Ali Bongo a été longtemps contesté. Des violences post-électorales et des pillages ont secoué Port-Gentil, dans l’ouest du pays, faisant plusieurs morts, dès son accession au pouvoir à l’issue d’un scrutin controversé.
L’opposition dénonce une personnalisation du pouvoir. Un mort est enregistré, en décembre 2014, lors de violents heurts opposant manifestants de l’opposition et forces de l’ordre.
Pour ne rien arranger, alors que le pouvoir était confronté à une crise économique en raison du plongeon des cours du pétrole, et fait face à des tensions sociales croissantes, avec des grèves dans la fonction publique et le secteur privé, le journaliste français Pierre Péan assure, dans son livre « Nouvelles affaires africaines », qu’Ali Bongo a falsifié son acte de naissance, affirmant que le président est un enfant nigérian adopté par Omar Bongo pendant la guerre du Biafra, à la fin des années 1960. Or, selon la Constitution, il faut être né gabonais pour briguer la présidence.
Une thèse vigoureusement démentie par le pouvoir. N’empêche, la polémique enfle, faisant l’objet de plusieurs procédures judiciaires en France et au Gabon.
Se basant sur ce fait, l’opposition demande l’invalidation de la candidature d’Ali Bongo, répétant qu’il est un enfant nigérian adopté et qu’il ne peut pas être président. En vain.
Le pays a connu des troubles sans précédent après l’annonce de la victoire, le 31 août 2016, d’Ali Bongo, par la commission électorale, face à son adversaire Jean Ping. Des manifestations anti-Bongo éclatent, marquées par des interpellations par centaines, Assemblée incendiée, assaut des forces de sécurité contre le QG de Jean Ping… Ces troubles font trois morts selon les autorités, une trentaine selon l’opposition.
Victime d’un accident vasculaire cérébral, le 24 octobre 2018, en Arabie saoudite, Ali Bongo est hospitalisé pendant plus d’un mois à Riyad, puis transféré à Rabat. Une partie de ses pouvoirs est transférée au Premier ministre et au vice-président.
Le pouvoir est affaibli. D’ailleurs, la convalescence d’Ali Bongo sera ponctuée par un putsch raté d’une poignée de militaires, le 7 janvier 2019, suivie d’une autre tentative du directeur de cabinet, Brice Laccruche Alihanga. Ce dernier sera finalement interpellé le 3 décembre 2019, accusé de corruption.
Actuellement, Ali Bongo est placé en résidence surveillée, ont annoncé des officiers de l’armée dans une déclaration lue à la télévision. Ces derniers ont pris le pouvoir quelques minutes après l’annonce de la victoire de Ali Bongo pour un troisième mandat, dénonçant un scrutin tronqué.