1986. L’Afrique est endeuillée par la disparition de Cheikh Anta Diop, emporté par une crise cardiaque à l’âge de 63 ans. 1986 fera une autre victime bien moins médiatisée. Le laboratoire de carbone 14 de l’Ifan devenu orphelin ne survivra pas à son illustre créateur qui l’a bâti de ses propres mains. Aujourd’hui ressuscité, ce laboratoire qui sert de trait d’union entre Cheikh Anta Diop et l’Ifan a vu le jour en 1966. Retour sur l’histoire qui liait un scientifique à son labo, l’importance des recherches qui y ont été menées ainsi que ce qu’il est advenu du labo.
1960 marque un tournant dans la vie de Cheikh Anta Diop. «Je vais rentrer définitivement en Afrique noire dès la semaine prochaine, et j’essaierai de contribuer à la formation des cadres et de contribuer aussi à l’impulsion de la recherche scientifique», annonce-t-il après sa soutenance. Former les cadres, il ne lui en sera pas donné l’opportunité. Les portes de l’Université de Dakar lui sont fermées du fait de son opposition à Senghor et de la mention honorable, à défaut de très honorable, sanctionnant sa thèse de doctorat. Il se consacre donc entièrement à la recherche scientifique à l’Ifan où il est recruté comme Assistant. Très vite, il gagne le respect de Théodore Monod, Directeur de l’Ifan, qui soutient son projet de création d’un laboratoire. Une salle est aménagée, du matériel acheté et Cheikh Anta Diop est envoyé en stage dans un laboratoire de radiocarbone en France. «Il s’est écoulé quatre années (1963-1966) entre le moment où fut donné le premier coup de pioche pour la construction des locaux et la mise en service du laboratoire», écrit Cheikh Anta Diop dans son ouvrage, Le Laboratoire du radiocarbone de l’Ifan.
S’appuyant sur sa formation pluridisciplinaire qui inclut notamment des études en Chimie auprès du Prix Nobel Frédérique Joliot-Curie, le chercheur monte tout seul son laboratoire et assure son fonctionnement. Pendant 20 ans, il trouvera refuge dans ce local où il mène des recherches pour donner une base scientifique à sa thèse. Un labo pour réhabiliter l’histoire de l’Afrique. La thèse de Cheikh Anta Diop peut être résumée ainsi : La brillante civilisation de l’Égypte antique qui a inspiré Grecs et Romains était noire et africaine. En rattachant l’Afrique à l’une des plus anciennes et l’une des plus avancées civilisations humaines, C. A. Diop défie donc l’idée d’un continent noir dénié d’histoire. «En réalité, l’Afrique est à l’origine de la civilisation humaine», explique-t-il…
Dossier réalisé par Marly DIALLO