Trois grandes causes sont à l’origine des défauts de qualité des médicaments vendus en dehors du circuit légal. Il s’agit, selon un agent de santé, «des phénomènes de décomposition, du manque de respect des bonnes pratiques de fabrication, de la présence de contrefaçon et des manipulations hasardeuses de la part des vendeurs». S’agissant de la décomposition ou dégradation du médicament, un pharmacien local explique : «La stabilité d’un médicament peut être définie comme son aptitude à conserver ses propriétés chimiques, physiques, microbiologiques et biopharmaceutiques dans les limites spécifiées pendant toute sa durée de validité. La stabilité des préparations pharmaceutiques dépend de paramètres extrinsèques (température, humidité et lumière) et intrinsèques (formulation galénique, conditionnement, matières premières) que le fabricant se doit d’évaluer par des études de stabilité (études de dégradation accélérée, études de stabilité en temps réel). Ces tests permettent de fixer une durée limite de conservation et des conditions de stockage (température inférieure à 30°C, comprise entre +3°C et +8°C, humidité… ).»
Défaut de conservation des médicaments
S’expliquant sur les conditions de stockage inadaptées, notre interlocuteur confie : «Ici, à Touba, ces normes de conservation s’avèrent difficiles à respecter puisque les températures dépassent couramment les 30°C avec un taux d’humidité élevé. Les conditions dans lesquelles sont vendus les médicaments sur le marché illicite altèrent inévitablement les propriétés physicochimiques des médicaments : l’exposition en plein soleil détériore rapidement les comprimés, l’humidité ambiante, accélère les processus de décomposition des molécules chimiques actives… Des produits hautement thermolabiles -tels que les vaccins, les suppositoires, l’insuline- sont négligemment disposés à l’air libre sur les marchés des pays en développement».
Par exemple, sur plus de 50 dépôts visités à Touba, 52% présentaient ce type de produits sans autres précautions, 15% les conservaient dans des glacières, 5% possédaient un réfrigérateur et les autres ne possédaient pas de médicaments photosensibles ou thermosensibles. Les mauvaises conditions de stockage affectent gravement la qualité des médicaments de la rue. De son côté, la dénaturation du principe actif et/ou de la formulation galénique (excipients) affecte les propriétés thérapeutiques et donc l’efficacité du médicament. La date de péremption représente la limite au-delà de laquelle les standards de qualité ne sont plus garantis. Malheureusement il arrive que la forme pharmaceutique soit déconditionnée et il n’est plus possible de savoir si le médicament est utilisable. Ensuite, les vendeurs semblent s’arranger de façon à pouvoir dissimuler la date si celle-ci est passée. Ils posséderaient, d’après certaines indiscrétions, des appareils permettant de modifier les inscriptions sur les blisters ou les dates.
Malick SY