L’affaire du terrain destiné au tribunal de Pikine-Guédiawaye prend une tournure encore plus explosive. Selon les révélations de L’Observateur, une série de confrontations entre anciens hauts responsables de l’État vient d’avoir lieu, dans le cadre d’une enquête judiciaire qui met à nu un système complexe d’attributions foncières controversées.
Au centre de la tourmente, deux ex-directeurs des Domaines, Mamadou Guèye et Mame Boye Diao, ont été opposés à Mamadou Moustapha Dia, président de la Commission de Contrôle des Opérations Domaniales (CCOD). Les déclarations de ce dernier semblent mettre à mal les justifications des anciens responsables.
Un autre acteur majeur entre dans la danse : Mohamed Anas El Bachir Wane, ex-directeur des constructions au ministère de la Justice. Selon L’Observateur, il n’a pas hésité à mettre en cause directement l’ancien Garde des Sceaux, Ismaïla Madior Fall. Ce dernier aurait, selon les témoignages recueillis, signé un protocole avec le promoteur Cheikh Guèye, lui cédant 9 598 m² de terrain en échange de la construction d’un centre de surveillance électronique.
Les allégations ne s’arrêtent pas là. Cheikh Guèye aurait affirmé que le ministre lui avait réclamé la somme de 250 millions FCFA pour concrétiser le projet. Il aurait versé 50 millions en liquide, directement dans le bureau ministériel. La CCOD aurait par la suite annulé le bail, estimant la procédure irrégulière.
Sur le terrain, à Guédiawaye, Serigne Assane Fall Dia, chef du Bureau des Domaines local, a indiqué n’avoir découvert l’existence des décrets d’affectation qu’après une visite d’une commission ad hoc. Une lettre de Mamadou Guèye, qu’il dit avoir reçue, évoquait les grandes lignes du lotissement.
Les documents analysés montrent que la superficie litigieuse — 85 ares et 14 centiares — a été divisée en 36 parcelles. La liste des bénéficiaires, signée par Mame Boye Diao, est aujourd’hui au cœur d’un tollé. Certains individus figurant sur cette liste affirment ne jamais avoir formulé de demande, ni été informés. Plusieurs ont déjà déposé plainte pour faux et usage de faux.
Autre acteur clé dans cette affaire : Abdoulaye Diouf, directeur général de l’Urbanisme. Il soutient que le morcellement des terrains figurait dans le Plan d’Urbanisme de Détail (PUD), établi sans que le décret initial de 2020 n’ait été formellement abrogé. Une irrégularité qui remet en question l’ensemble du processus.
Mamadou Moustapha Dia, pour sa part, a déclaré que tous les baux accordés sans passage devant la CCOD sont de facto illégaux. Il pointe du doigt Mamadou Guèye et Serigne Assane Fall Dia comme les principaux responsables des dérives observées.
Face aux enquêteurs, Mame Boye Diao a reconnu avoir attribué, à titre gracieux, cinq parcelles à des proches. Mais il nie toute implication dans les autres attributions, sans pouvoir fournir la preuve écrite de l’abrogation du décret de 2020.
Quant au promoteur Cheikh Guèye, il a reconnu avoir obtenu des documents cadastraux grâce à Serigne Assane Fall Dia et Mamadou Guèye. Mais là encore, l’origine du bail est trouble : incapable de justifier sa légalité, il laisse planer le doute sur toute l’opération.
Emedia avec Senenews