Le 9e Forum international de Dakar sur la Paix et la Sécurité en Afrique a démarré ce lundi 27 novembre, pour deux jours. Le chef de l’État, Macky Sall, a présidé la cérémonie d’ouverture au niveau du Centre international de conférence Abdou Diouf (Cicad), en compagnie, entre autres personnalités, de son homologue mauritanien. Mohammed Ould Ghazouani a relevé « la pertinence » du thème retenu : « L’Afrique des potentiels et des solutions face aux défis sécuritaires et à l’instabilité institutionnelle ».
Celui-ci « met en lumière les contrastes de notre continent d’une Afrique grande et riche, qui aspire à l’émergence mais, toujours en retard sur les processus de développement. Une Afrique qui progresse sur la voie de la démocratie mais encore secouée par l’instabilité institutionnelle. Une Afrique engagée à faire taire les armes, mais toujours sous le feu ravageur des conflits et du terrorisme. L’Afrique, on le sait, est un vaste continent, plus de 30 millions de km2, plus de 60% de terres arables, d’importantes ressources en eau, en hydrocarbures, etc. La liste n’est pas exhaustive. Assurément l’Afrique est riche par son immense potentiel mais, les règles et pratiques d’échanges inégales contribuent à l’appauvrir. C’est une réalité », a justifié l’hôte sénégalais.
« C’est pourquoi, nous réclamons une gouvernance politique, économique et financière mondiale plus juste et plus équitable », a-t-il réitéré avant de poursuivre : « Parmi nos priorités figurent, premièrement, la réforme du Conseil de sécurité des Nations Unies, et celle de l’architecture financière mondiale y compris les institutions de Bretton Woods, Fonds monétaire et Banque mondiale. Qui sont des institutions importantes héritées de la Seconde guerre mondiale. Il faut qu’elles soient plus représentatives des réalités de nos temps. Deuxièmement, la révision des règles de l’Ocde sur l’accès au crédit, sur la durée des délais de grâce et sur les périodes de remboursement. Ce qui permettrait de mobiliser davantage de ressources pour financer les besoins de développement du continent. Troisièmement, la lutte contre les pratiques fiscales anormales notamment l’évasion fiscale et les projets fiscaux abusifs pour que l’impôt soit dûment payé là où la richesse est créée surtout en ce qui concerne les industries extractives (mines, pétroles et gaz). »
Il enchaine : « Il faudra lutter contre la corruption également et favoriser les réformes dans les gouvernances des États notamment en matière d’administration pour développer le financement privé » dans la mesure où indique-t-il : « Une gouvernance mondiale plus juste et plus équitable contribuerait à faire émerger l’Afrique des solutions c’est-à-dire une Afrique qui compte davantage sur ses propres ressources pour financer ses efforts de développement et offrir des nouvelles opportunités de commerce et d’investissements à l’ensemble de ses partenaires. »
Poursuivant, il a salué « les acquis déjà réalisés » dans l’amélioration de la gouvernance depuis ces deux dernières années avec d’abord pour l’Ocde l’adoption en octobre 2021 de l’accord historique sur un impôt minimum de 15% afin de lutter contre l’évasion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices par les multinationales. « Maintenant, préconise-t-il, il faut rendre cet accord applicable aussi sur le continent africain. »
« L’autre décision à saluer, a-t-il relevé, c’est l’adhésion de l’Afrique au G20. Cette décision a été vraiment un progrès dans la lutte que nous menons pour plus d’inclusion et plus d’ouverture dans la gouvernance mondiale. Mais également, je salue la décision du Fonds monétaire international (Fmi) lors du sommet de Marrakech d’octroyer au continent africain un troisième siège au Conseil d’administration du Fonds. »
« Cette dynamique pourrait être renforcer par la réforme du Conseil de sécurité des Nations Unies et la mise en place du pacte de Paris pour les peuples et la planète qui comprend entre autres préoccupations la réforme de l’architecture financière mondiale et la justice climatique », souhaite-t-il avant de faire remarquer : « Alors que la Cop 28 démarre cette semaine à Dubaï, l’enjeu principal pour nous, c’est de pouvoir exploiter la ressource disponible pour satisfaire nos besoins d’industrialisation et d’accès universel à l’électricité dont plus de 600 millions d’Africains sont encore privés », a-t-il indiqué. « Il ne faudrait pas qu’on subisse encore cette injustice climatique. »
« C’est mon combat. Combat que nous continuerons à mener puisque c’est tout simplement injuste, et il n’est pas acceptable de supporter cette injustice », a-t-il appuyé.
Macky Sall de poursuivre : « Le thème choisi nous rappelle aussi notre part de responsabilité dans les défis sécuritaires et instabilité institutionnelle qui agitent le continent. A ce propos, « je ne sais pas ce qui se passe avec nos frères militaires. L’Afrique a besoin de pause pour travailler pour le développement. Il ne faut pas que tous les matins, on nous annonce une mutinerie des militaires qui prennent une base ou libèrent des prisonniers. On ne peut pas développer l’Afrique dans ces conditions », a-t-il regretté.
Comme solution, il a préconisé la tenue d’une rencontre entre l’Union africaine (Ua) et les chefs militaires, expliquant : « En plus du coût humain et matériel, les conflits armés plombent totalement nos efforts sur la voie du développement économique et social. Toutes ces perceptions contribuent à renchérir le crédit à l’Afrique. Il faut qu’il y ait une rencontre entre (l’Ua) et les chefs militaires. Cela ne peut pas continuer. Autrement, on va continuer à reculer. Il est temps de faire taire les armes, et de privilégier le dialogue pour le règlement des conflits. C’est aussi par le dialogue que nous surmonterons les clivages partisans pour bâtir des coalitions nécessaires à la stabilité des Institutions. C’est dans chaque pays qu’on doit développer une philosophie du dialogue national. Il faut que les gens se parlent. Il faut qu’ils trouvent des compromis parce que nos pays sont très fragiles ».
Dié BA