« Du fait de l’opacité des contrats, 50 milliards de dollars sont perdus par les pays africains producteurs de pétrole ». Des statistiques fournies par Jean Marc Gravellini, chercheur associé à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), intervenant lors de l’atelier intitulé : « Gouvernance des ressources naturelles de l’Afrique : entre convoitises, instabilité et interventions extérieures », ce mardi 28 novembre, deuxième et dernier jour du Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique.
D’où la recommandation faite par Jean Pierre Favennec, Président de l’association pour le développement de l’Énergie en Afrique (Adea), et ancien ministre conseiller du Président Macky Sall, « d’avoir une bonne négociation des contrats » pour bénéficier de cette source de revenus importante que sont les ressources naturelles.
Faisant une analyse de la situation actuelle, il a confié « que « le problème en Afrique de l’Ouest dont le Sénégal qui commence à produire, on est obligé de faire appel à des sociétés extérieures, que ça plaise ou que ça ne plaise pas », indiquant que « c’est une des difficultés que l’on a. »
« Sur ces aspects-là, l’Afrique devrait pouvoir se spécialiser parce qu’il n’y a pas suffisamment de juristes spécialisés dans la rédaction des contrats en Afrique subsaharienne », a retenu le modérateur du panel, Jean Michel Seck, ingénieur en économie pétrolière et membre de l’Ordre national des experts du Sénégal.
« J’ai lu qu’il y avait une stratégie intégrée de gouvernance des mers et des océans visant l’objectif 2050. Cette stratégie a été élaborée par l’Union africaine comme elle a élaboré la stratégie de l’architecture de sécurité pour 2063, comme elle a élaboré en 1980 le fameux plan d’actions de Lagos. Mais ce qui pose problème, comme l’ont rappelé les intervenants, c’est la mise en oeuvre. Au Sénégal, nous avons formé très peu de juristes maritimistes. Je le sais parce que j’ai souvent travaillé avec les compagnies d’assurance sur des textes extrêmement complexes, et il n’y avait pas de juristes à l’époque au Sénégal », a souligné l’ancien Directeur de la Société africaine de raffinage (Sar). »
Avant de poursuivre : « En Afrique, le domaine maritime est estimé à 13 millions de km2 avec des ressources mais, ces 13 millions n’incluent pas les 6 millions de km2, qui font partie de ce qu’on appelle le plateau continental, et que les géologues connaissent bien. Nous allons produire au Sénégal du pétrole offshore, du gaz naturel offshore, si nous n’avons pas de juristes maritimistes, quand des contentieux vont commencer, on aura l’obligation à nouveau de contracter avec les compagnies étrangères parce que le Sénégal n’aura pas anticiper. »
Parmi les participants, l’ancien ministre de l’Énergie et des Mines du Burkina Faso, Bachir Ismaël Ouédraogo a déploré que les ressources, que ce soit l’or, le diamant, au lieu d’être un facteur de développement durable, ces ressources deviennent une malédiction avec son corolaire de guerre, de misère et de déplacements des populations. »
Que faire pour changer ces paradigmes ? « Il nous faut d’abord une vision » basée sur « le leadership et la gouvernance », préconise-t-il, insistant aussi sur le volet formation des jeunes. »
Au moment où le constat est fait sur les 54 pays africains, 45 dépendent des exportations de matières premières dont le pétrole et le gaz, « la solution viendrait de notre collaboration entre nous Africains », pour éviter la malédiction des ressources naturelles, a indiqué le Burkinabé. Pour qui, « le Sénégal doit être un hub de métallurgie » au profit de la sous-région.
Il urge aussi de corriger le maillon manquant concernant l’industrialisation, ont suggéré les panélistes.
Enseignant-chercheur en Science politique UFR SJP à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, Papa Fara Diallo, a relevé « l’impérieuse nécessité d’une gouvernance inclusive et transparente » pour contenir la malédiction des ressources naturelles.
Dié BA et Abdoulaye SYLLA (Photo)