«Un seul être vous manque et tout est dépeuplé». Cela se voit que le pape du sopi n’est plus en activité. Il a laissé un champ de ruines derrière lui. Le Parti démocratique sénégalais manquera une deuxième élection présidentielle de suite. La «dévolution monarchique» non plus ne marche pas dans sa propre formation politique. Wade-fils a été d’abord frappé d’incapacité électorale. Aujourd’hui, il est disqualifié pour une histoire de double nationalité. Double peine pour lui. Le sort s’acharne. Mais il ne doit s’en prendre qu’à lui- même pour avoir procrastiné. Le connaissant bien pour avoir collaboré avec lui à l’Agence de l’Oci, puis au sein de plusieurs ministères, il avait impressionné pour sa proactivité. Il faisait les choses en temps et en heure. Il ne remettait jamais à demain ce qu’il pouvait faire aujourd’hui. Tout le temps mis à se débarrasser de sa qualité de citoyen Français est incompréhensible. C’est une faute. En matière d’élection présidentielle et dans la vie tout court, le diable est dans chaque détail. Il faut être monomaniaque. Karim Meissa Wade a été quelque peu négligeant. Mais ne lui jetons pas toutes les pierres de la terre. S’il était resté dans la course, personne n’aurait crié au scandale.
Karim devra encore prendre son mal en patience
La nationalité française dont il s’agit est innée chez lui. Il ne l’a pas acquise. Ça lui est tombé dessus. Un parent est un ami imposé. Les décisions du Conseil constitutionnel s’imposent aussi à tous. C’est une institution de la République qui doit forcer le respect. On doit se garder de la décrier. La seule remarque qu’on peut placer est que le conseil aurait aussi bien pu faire preuve de pédagogie en choisissant l’application bienveillante de la loi. Mais qui sommes-nous pour délivrer des leçons ? Les 7 «sages» sont les hommes de l’art. Que chacun reste donc à sa place. Si turpitude il y a, elle est à mettre sur le compte du Pds. Les conséquences de l’éviction du vieux parti de la course seront terribles. Il a affreusement perdu le pouvoir en 2012. Après l’avoir convoité 26 années durant, les libéraux n’en avaient pas fait grand-chose. La déwadisation a tout de suite commencé. La prison puis l’exil ont suivi. Démobilisés, désargentés, les compagnons fidèles de la première alternance ont longtemps espéré le retour d’un monde fini et celui du candidat virtuel avant de se fracasser sur la réalité. Leader naturel, beaucoup d’entregent et un carnet d’adresses hors du commun, Karim devra encore prendre son mal en patience et rentrer immédiatement s’il veut peser et réparer en même temps sa bévue. Ses soutiens qui ont déjà trop patienté le méritent. Le Pds aussi mérite de survivre même s’il est très fatigué. La présidence s’est éloignée. La résilience est la priorité.
Vingt candidats et candidats vains
Vingt candidats. C’est un triste record. Ce n’est pas la démocratie. C’est une anarchie. Le premier à devoir s’en inquiéter se trouve être le candidat du pouvoir. Tous les dissidents de la majorité sont aussi en lice. On voit mal com- ment Amadou Ba peut passer dès le premier tour. Pour le camp de la continuité, il est toujours trop risqué de compétir dans la confusion et la démesure. En vérité, on va au-devant d’une immense cacophonie. Le fait est que le Sénégal a fait le choix de la quantité au détriment de la qualité. Qualité de vie, qualité du débat, qualité des candidats, tout dégringole. C’est le propre d’un pays qui régresse sans progresser. Un pays sans grande discipline, sans émergence comportementale mais avec beaucoup de mauvaises pratiques et d’ambitions démesurées est difficile à gouverner et à développer. On se contente d’inaugurer les chrysanthèmes et de faire de la gestion de crises. Ce n’est pas du pessimisme mais de la lucidité. Mamadou Dia était le dernier des Mohicans. Aucun autre ne lui arrive à la cheville.
Par Assane GUÈYE