Mouhamadou Madana Kane, Banquier et leader du Mouvement DUNDU était l’invité du Jury du Dimanche. Sur les ondes de la 90.3 Iradio, il a abordé la situation financière du pays héritée par le régime du président Bassirou Diomaye Faye. Lors de la passation de service au ministère des Finances, le ministre sortant déclarait : « … l’ampleur des résultats tangibles que je viens d’indiquer au profit des populations sénégalaises a naturellement éprouvé les finances publiques avec un surcroit d’endettement et de dépenses courantes ». Interpellé sur cette affirmation, l’invité du JDD dira que la réponse à cette question va engendrer un certain nombre de conséquences bien entendu sur le projet qui a été présenté au Sénégalais par le nouveau régime et qui devra être mis en œuvre. « Et donc, si on n’a pas de marge de manœuvre budgétaire, ça va être très difficile. Ce qui est intéressant de noter par rapport à cette question de la dette, c’est aussi bien le ministre entrant que le ministre sortant sont d’accord sur le fait que la situation est compliquée. On a entendu le nouveau ministre des Finances à sa sortie de la mosquée le jour de la Korité annoncer qu’on va vers des lendemains difficiles.
Ça a été confirmé par le ministre des Finances sortant qui annonce lors de la passation de service que les finances publiques ont été très éprouvées ces dernières années et qui va plus loin jusqu’à conseiller à son successeur de faire le focus sur le rétablissement des marges budgétaires de l’État et donc en faisant un focus sur les dépenses, les recettes et la maîtrise de la dette. Alors, ce qui veut dire que la situation est réelle. Puisqu’aucun des ministres ne conteste pas la situation », a-t-il expliqué.
Pour sortir de ces difficultés, Mouhamadou Madana Kane estime qu’il faut rétablir les marges budgétaires de l’État. « Il faut réduire les dépenses. Il faut rationaliser les dépenses plutôt. Augmenter les recettes et rétablir la question de la dette. Ça va être extrêmement difficile. Parce que le nouveau gouvernement ou le nouveau régime a été élu sur la base de promesses, notamment de création d’emplois, mais également de réduction du coût de la vie », indique-t-il. Sur une question de savoir pensez-vous qu’il existe des solutions concrètes et immédiates à cette situation de réduction du coût de la vie ? Il rétorque : « il y a des solutions classiques et des solutions innovantes à imaginer. Alors, ce qu’il faut noter, c’est important, c’est que lorsqu’on regarde le programme du candidat, il est annoncé que dans la première année du mandat, la question de la cherté de la vie et de la baisse des denrées de première nécessité va être abordée. Alors, comment on va faire ? Classiquement, historiquement, les gouvernements qui se sont succédé ont fait des concertations, ont annoncé des mesures, ont même pris des décrets, des lois parfois, pour justement réduire, fixer les prix. Je ne pense pas que ça ait été la bonne idée. Je pense que c’est une bonne approche, parce que ce n’est pas une approche par le marché, mais plutôt une approche d’interventionnisme d’État, qui n’a pas produit ses fruits », dit-il. Avant de poursuivre : « puis qu’aujourd’hui, les gens continuent de dire que les loyers sont élevés, continuent de dire que les prix des denrées augmentent, parce qu’on n’a pas une maîtrise des facteurs de production et des facteurs de distribution. Ce qui fait que, naturellement, on est dépendant du marché et on peut prendre toutes les mesures qu’on veut. Si le marché ne réagit pas, finalement, ça n’aura pas d’effet. Donc, ce qui fait que la seule marge de manœuvre, de maîtrise que l’État a, c’est de subventionner. Or, peut-on subventionner si aujourd’hui vous êtes sous programme FMI ? Parce que ça, les gens l’oublient ».
Selon toujours Mouhamadou Madana Kane, naturellement, on n’a pas le temps de construire de la croissance qui va générer justement des augmentations de salaires et autres et d’avoir un effet sur le pouvoir d’achat des populations dans un délai aussi court. « Ce qui risque d’arriver alors, c’est qu’on va aller vers les subventions. Et là, si on va vers les subventions, comment on va faire avec la réduction des marges de manœuvre budgétaire ? J’ai vu dans le programme que ce qui est prévu pour réduire les coûts de la vie, c’est de réorganiser le système de subventions et des fonds qui existent.
Et par ailleurs, de prendre en compte, de réorganiser aussi l’utilisation des ressources issues du pétrole et du gaz qu’on n’a pas encore. Donc ce qui fait qu’à mon avis, on va vers des périodes très difficiles. C’est une mesure qui va être très difficile à mettre en œuvre », conclut-il.
Cheikh Moussa SARR et Pape Doudou Diallo (Photo)