La splendeur de la Chine d’aujourd’hui n’est pas un hasard, c’est la morale du travail : abnégation dans le travail, respect de l’assiduité et de la ponctualité, la culture de la performance, la valorisation de soi dans la façon de faire son travail, le contrôle et la maitrise de son énergie vitale, le respect du bien d’autrui et du bien commun.
Le caractère d’un peuple, sa discipline, sa résilience peuvent se mesurer par la nature de son rapport avec le travail. Tout le monde a droit à la paresse : la société a déjà réglé cela par les congés, la réglementation de la durée de la journée de travail et les vacances. Ce que l’on ne saurait comprendre, c’est par contre une culture de la paresse. Bâtir une civilisation sur la base de l’oisiveté payante, c’est un non-sens.
Travailler et accumuler des richesses, c’est selon la lecture protestante, une manière de s’enrichir pour Dieu, et c’est exactement la même chose pour toutes les confessions religieuses. Ce n’est donc pas concevable qu’une société constituée à majorité de croyants opte pour la facilité et la corruption. La corruption avilit les âmes et détruit la société, car elle s’attaque à tous les ressorts qui constituent la ceinture de sécurité morale de l’individu.
Un homme corrompu n’a plus de dignité, il n’a plus de liberté parce qu’il a accepté de souiller son âme par avidité ou par impatience. C’est pourquoi l’école de la république, les médias, les écoles coraniques doivent inscrire dans leurs cahiers de charges l’engagement à faire intérioriser aux jeunes la gravité de la tentation à la corruption. C’est une honte que d’être citoyen d’un pays où l’indice de la pauvreté et celui de la corruption sont dans une gémellité constante. La corruption agit sur la rentabilité et le développement de nos entreprises et de notre économie comme un cancer sur l’organisme. C’est pourquoi nous n’avons pas le choix : soit nous le combattons, soit nous en mourons en tant que nation civilisée, épanouie et fière devant les autres nations.
Les hommes ne forment pas une communauté humaine pour que chacun ruse avec celle-ci afin de vivre à ses dépens. La cannibalisation de l’Etat par les citoyens est une des causes de la pauvreté des pays africains. C’est complètement indécent de vampiriser l’Etat en attendant tout de lui. La vocation d’un Etat n’a jamais été de se substituer aux individualités ; il a été plutôt institué pour, encourager, faciliter encadrer, promouvoir et protéger les initiatives individuelles.
Le Sénégal sera un peuple le jour où il commencera à faire une introspection sans complaisance sur ses tares et à s’engager résolument à extirper de ses mœurs toutes les causes d’involution. Notre rapport au bien public ainsi qu’au service public doit désormais être marqué du sceau de la coresponsabilité. Etre exigeant avec soi-même et avec les serviteurs de l’Etat est l’acte fondateur de la véritable citoyenneté (commander et obéir à la fois).
Pape Sadio THIAM