Pape Malick Ndour, ancien ministre de la Jeunesse sous le régime de Macky Sall, s’exprime sur la polémique entourant la question salariale dans la fonction publique. Le Premier ministre, en plein cœur de cette controverse, rencontrera demain, jeudi, les partenaires sociaux pour discuter de la question salariale. Pourtant, à l’Assemblée nationale, le gouvernement semblait avoir déjà pris une décision. Selon les propos du Premier ministre, « Dans le cadre de l’effort national, un rebasing salarial sera opéré afin de rendre plus équitables les niveaux de revenu… »
Le « rebasing salarial » désigne un processus d’ajustement des salaires, qu’il soit à la hausse ou à la baisse, dans le but d’assurer une plus grande équité entre les agents publics. Toutefois, dans le contexte actuel, marqué par un débat sur la recherche de marges budgétaires dans un cadre de « soi-disant effort national », cet ajustement semble aussi motivé par la volonté de réaliser des économies sur la masse salariale.
Il est important que les Sénégalais comprennent ceci : ajuster à la baisse revient à diminuer les salaires de certaines catégories d’agents. En revanche, ajuster à la hausse impliquerait une augmentation de la masse salariale, une option que le gouvernement semble exclure. Difficile de ne pas remarquer l’ironie de cette situation. Quel est donc l’objectif sous-jacent ? Le gouvernement doit clarifier cette question lors de ses échanges avec les syndicats.
Si le but poursuivi est de relancer la vieille rengaine de l’équilibre salarial entre les différentes catégories d’agents, il est essentiel de rappeler certains points aux autorités actuelles.
Bien que je comprenne la volonté du Chef du gouvernement de réduire les salaires des directeurs et des ministres, je tiens à souligner que cette mesure est avant tout populiste et aura un impact minimal sur le déficit. D’après mes simulations, une baisse de 40 % des salaires des ministres et des directeurs généraux du secteur parapublic n’aurait qu’un effet limité : environ 3,5 milliards par an, soit moins de 0,2 % du déficit actuel.
Quant aux autres corps jugés « privilégiés » de l’administration (impôts, trésor, commerce, magistrature…), il est inconcevable que, sous prétexte de rebasing salarial, ils subissent les conséquences d’une gestion budgétaire déficiente, surtout en mémoire de l’ancien engagement syndical d’Ousmane Sonko, fervent défenseur des inspecteurs des impôts. Les agents des régies financières ne devraient pas voir leurs salaires réduits, surtout au vu de leur contribution essentielle au développement du pays, comme l’a toujours souligné Ousmane Sonko.
Enfin, pour les enseignants, les agents de santé et les travailleurs du secteur primaire, il est impératif que ce rebasing salarial se traduise par une hausse généralisée des salaires, conformément aux nombreuses promesses faites par les opposants d’hier, désormais au pouvoir. Cette hausse pourrait être réalisée sans toucher aux indices de la solde, en respectant simplement la promesse électorale d’indexation de l’impôt sur le revenu (IR) sur l’inflation, une mesure qui, si appliquée, augmenterait les salaires de tous les travailleurs, y compris ceux du secteur privé, comme cela avait été le cas en 2013.
En somme, je conseille au Premier ministre de ne pas toucher aux salaires. Au contraire, il devrait répondre favorablement aux attentes légitimes des secteurs en crise et négocier un pacte social où la grève ne serait pas la norme. Le gouvernement devrait s’engager à cesser les provocations et la diabolisation des agents de l’administration.