La polygamie, une réalité sociale au Sénégal. Si dans un passé récent les coépouses vivaient dans un même carré, aujourd’hui, on voit de plus en plus des ménages, avec des épouses qui ne sont pas sous le même toit. Cette distance n’est pas sans conséquences sur leurs progénitures, qui sont des frères et sœurs consanguins qui ne se fréquentent pas, sinon rarement. Pire, ils peuvent même ne pas se connaitre. Un vrai drame social qui est le revers de la médaille de la polygamie transparente ou non assumée (takkou souf).
La polygamie est une pratique répandue au Sénégal, notamment chez les musulmans. Devant l’officier d’état civil, les hommes peuvent choisir entre 3 options de régime matrimonial : la monogamie, la polygamie limitée à deux épouses et enfin la polygamie limitée à 4 épouses, comme l’autorise l’islam. Ces dispositions sont fixées par le Code de la famille. Il faut également noter qu’une autre pratique vient s’ajouter dans le corpus de stratégies matrimoniales au Sénégal, mais en dehors du cadre de l’état civil. Il s’agit de la polygamie non assumée, plus connue sous le nom de «Takkou Souf» et qui est une union cachée entre un homme et une femme, en présence de rares témoins. Dans les deux cas, souvent les coépouses n’habitent pas ensemble, ne se fréquentent pas ou, pire, ne se connaissent même pas. La jalousie peut aller jusqu’à éloigner leurs enfants respectifs. C’est cela aussi l’autre facette de la polygamie, surtout en milieu urbain.
Tendance des coépouses : Ne pas cohabiter
Dans la polygamie citadine, la tendance des coépouses est à ne pas vouloir cohabiter. Parfois, au-delà de la jalousie, il y a la crainte du mari de vivre l’enfer des querelles de femmes sous un même toit. Et avec les exigences de la vie urbaine, les femmes sont de plus en plus enclines à s’inscrire dans une logique d’indépendance financière et d’autonomie sociale. S’y ajoute le fait que la configuration sociale et spatiale des appartements pour la plupart ne favorise pas la cohabitation des coépouses. Toutes choses qui font que deux coépouses peuvent vivre pendant longtemps sans se fréquenter, encore moins se parler. Ce qui n’est pas sans conséquences sur leurs progénitures qui sont des frères et sœurs de même père.
Ce qui pourrait arriver à des frères et sœurs consanguins…
A quelques exceptions près, la polygamie est mal pratiquée au Sénégal. La famille polygame est ainsi connue comme une structure sociale où les membres entretiennent des rapports difficiles. On y observe de la jalousie, des rivalités, de l’égoïsme, des règlements de comptes directs ou par personne interposée (les enfants surtout). En réalité, les tensions ne manquent pas dans ces familles, même si les familles monogames présentent, elles aussi, des moments de tensions entre leurs membres. La rivalité entre femmes rejaillit inévitablement sur leurs progénitures qui en souffrent le plus. Ces frères et sœurs consanguins, qui subissent de plein fouet les conséquences de la polygamie avec des problèmes relationnels, des tensions et conflits.
Des frères et sœurs qui se sont connus lors du décès de leur père
Combien de fois a-t-on entendu ou vu des frères et sœurs de même père qui ne se connaissent pas, ou qui se sont connus lors du décès de leur père. Les exemples font florès. Et dans ces cas précis, on se demande bien à qui la faute ? Si la faiblesse du chef de famille polygame est parfois pointée du doigt, il faut dire que très souvent, la faute incombe aux femmes qui, par jalousie, refusent de connaitre leurs coépouses et leurs enfants. Un comportement qui peut être un couteau à double tranchant.
Par Ndèye Anna NDIAYE