Félicitations Professeur pour la prouesse réalisée…
Merci beaucoup. Je pense qu’il faut féliciter l’équipe et non un individu. Parce que la transplantation, c’est un travail d’équipe et c’est un travail qu’il faut préparer pendant des années.
Ça ne se prépare pas en une année, ni en deux ans, ni en trois ans. Parce que c’est quelque chose qu’il faut mettre en place en y allant doucement, en prenant toutes les mesures de sécurité.
Et quel est le secret de cette prouesse, professeur ?
Mais il n’y a pas de secret. Il suffit d’aller voir ce qui se fait ailleurs, de l’adapter à notre contexte d’exercice en essayant d’avoir une équipe engagée, surtout des gens motivés. C’est tout simplement ça. Il faut que l’équipe soit motivée. Ce ne sont pas les chirurgiens qui ont réalisé la transplantation, ni les néphrologues, ni les immunos. Mais tout le monde a travaillé. Les radiologues ont travaillé, les dentistes ont travaillé. Les ophtalmologues ont travaillé, les gynéco ont travaillé dessus. Tout le monde a travaillé dessus. Donc c’est toute une équipe. Nous sommes plus de 50 médecins sur le projet depuis des années. Donc c’est ça. Certains vont parler beaucoup plus que les autres, mais c’est un travail d’équipe.
Professeur, la médecine au Sénégal fait des prouesses. On a Ebola, on a le paludisme. On a les Siamois, et aujourd’hui la transplantation rénale. C’est quoi votre secret ? C’est la formation ou bien c’est la qualité des ressources humaines ?
Il y a une bonne qualité des ressources humaines. Les Sénégalais ont d’excellents médecins. Mais c’est l’environnement d’exercice qui nous limite parfois. Je pense que la transplantation rénale, ce n’est pas un geste compliqué.
Mais c’est un geste qui nécessite une organisation dont la mise en place est difficile. C’est l’organisation tout simplement. Mais au Sénégal, nous avons des médecins compétents. La plupart des gens, même si vous allez en stage à l’étranger, on vous propose de rester.
Ceux qui sont rentrés et qui ont été à l’étranger, c’est parce qu’ils ont voulu rentrer. Mais on nous propose toujours quelque chose à l’étranger. Donc je pense que les gens devront appuyer les médecins, surtout écouter ceux qui sont sur le terrain. C’est très important. Quelqu’un qui est sur le terrain, c’est très important.
Si vous êtes sur le terrain, vous ne pouvez pas être dans un bureau et penser que vous pouvez l’orienter. C’est très difficile. Il faut avoir l’habitude d’écouter ce qui sont sur le terrain pour mettre en place des projets solides, des projets adaptés aux besoins de nos populations.
Les moyens, c’est-à-dire investir, plus investir sur la recherche ?
Pour la transplantation, ça ne relève pas du domaine de la recherche encore, mais c’est du domaine des soins. Mais nous devons, moi j’ai l’habitude de dire, c’est une terminologie que j’utilise quand je discute avec mes collègues, qu’il nous faut développer une médecine de souveraineté. Ce que j’appelle médecine de souveraineté, c’est que nous ne devons plus dépendre des autres. Et pour ne plus dépendre des autres, nous avons besoin de moyens. Ici, chaque discipline, chaque praticien dans sa spécialité a des idées. C’est ce qu’il faut faire pour ne plus dépendre de l’étranger.
Mais pourquoi les gens ne sont pas écoutés ?
Je pense qu’il faut partir de ce constat-là, réunir les praticiens, chacun dans son domaine, voir les disciplines pour lesquelles nous évacuons des malades à l’étranger et réfléchir avec eux pour mettre en place des programmes pour éviter toute évacuation sanitaire à l’étranger. C’est possible, nos médecins sont très compétents. Il faut les écouter, tout simplement.
CMS avec Pape Alioune SARR