Le président de la République du Sénégal nouvellement élu, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a promis de protéger les lanceurs d’alerte. Une décision bien appréciée par Me Amadou Aly Kane, avocat et défenseur des droits humains. Invité de l’émission Jury du Dimanche sur les ondes de la 90.3, Iradio, il a précisé d’emblée : « quand on dit lanceur d’alerte, les gens pensent à un délateur. C’est-à-dire quelqu’un qui dénonce vraiment dans le but de nuire. Bon, je suis contre Mme Fall, et voilà, donc tout de suite, je vais faire une dénonciation contre elle dans le but de la nuire. C’est un peu ce qu’on appelle dans le langage commun, du porter presse. Il ne s’agit pas de ça. Un lanceur d’alerte, ce n’est pas forcément une personne. Ça peut être une personne, ça peut être un groupe, ça peut être une institution. Son rôle, c’est de lancer un signal d’alerte, un signal d’alarme dans le but de déclencher un processus de régulation et de mobilisation. Pourquoi ? Parce qu’elle a une connaissance, ou il a une connaissance, si c’est un groupe, d’un danger, d’un risque ou d’un scandale. Il ne s’agit pas seulement de personnes ».
Pour revenir à la protection des lanceurs d’alerte contre le délit de diffamation il a soutenu que : « cette question est liée également aux modalités par lesquelles on peut lancer l’alerte. Aujourd’hui, on dit qu’il ne faut plus lancer l’alerte. Mais quand vous avez une alerte, vous la lancez où ? Il faut aussi qu’on dise ça. Je vois qu’il n’y a pas un ministère de la bonne gouvernance. Je n’ai pas connaissance qu’il y ait un organe auquel on peut s’adresser. Parce que moi, je peux concevoir que lancer une alerte ne signifie pas seulement aller à la radio ou à la télé ou dans un journal. Donc, il faudrait peut-être créer un ministère de la bonne gouvernance. Dans le gouvernement actuel, peut-être, il faut donner à un ministre précis ou à un ministère précis cette charge-là. Donc, il faudrait qu’il y ait un organe qui reçoit les dénonciations.
Et d’ailleurs, que cet organe-là même soit démultiplié. Il faut qu’on en ait, je ne sais pas, une section au niveau de la présidence. Il faut qu’on en ait, je ne sais pas, une section au niveau de la primature. Une section dans un ministère précis. Parce que si vous le mettez, l’organe, il est logé dans un seul endroit ».
Il faut dire que les dénonciations, nécessairement, peuvent ne pas se passer de manière publique. On peut écrire, donner les preuves. Comme ça, l’enquête est déclenchée pour voir si c’est vrai ou faux. Est-ce que vous pensez que cela pourrait contribuer, justement, à renforcer la transparence dans la gestion de nos dires ? Pour répondre à cette question l’invité du Jury du Dimanche laisse entendre : « Moi, je pense que c’est très important. Parce que nous sommes dans un pays où l’un des problèmes, le plus important, c’est que les personnes, souvent, on va dire, bénéficient d’une sorte d’impunité. Voyez-vous.
Aujourd’hui, quand vous avez un problème, à qui vous adressez-vous ? Vous êtes victime de violences policières.
Vous habitez dans l’arrière-pays il n’y a pas de journalistes. Il n’y a pas d’organisation d’avocats. Comment vous faites ? Il serait bon que, dans tous les pays, les gens puissent avoir quelqu’un à qui ils peuvent soumettre leurs problèmes. Et c’est en cela que je dis que c’est très utile qu’il y ait un organe qui soit chargé de recevoir les dénonciations. Et maintenant, cet organe va les répartir vraiment en fonction de la nature des dénonciations. Parce que l’organe aussi ne peut pas avoir une compétence, on va dire, générale ».
Donc, explique-t-il, il faut préparer une loi. Parce qu’il y a des lois qui existent dans d’autres pays comme en France. « Parce qu’on peut s’inspirer des lois qui existent dans ces pays et préparer ici une loi.
Mais en tout cas, moi je considère qu’il faut qu’il y ait une sorte de contrôle au-dessus des décideurs au-dessus des agents de l’État. Que chacun sache ce qu’il fait, peut-être, on va dire, dénoncé et sanctionné. Donc, ça aidera les gens à agir dans le bon sens. A bien faire le travail. A donc adopter une conscience du service public beaucoup plus élevée ».
Cheikh Moussa SARR et Pape Doudou DIALLO (Photo)