Depuis quelques semaines, les difficultés de la presse sont étalées au grand jour. La presse vit des jours sombres, pas du fait de son état de précarité structurelle, mais plutôt du fait que l’opinion nationale en fait son sujet de discussion. Tout le monde savait que la presse allait inéluctablement vers le mur. L’impasse était devenue incontournable. Et voilà des années qu’on alertait sur une mort programmée de cette presse dont certains ne vivaient que sur perfusion et de manière artificielle. Les médias ont toujours vécu ou survécu au-dessus de leurs moyens. Un journal à 100 ou 200 francs ne peut être viable. Il l’est encore moins si la publicité ne suit pas. Le pouvoir d’achat du Sénégalais moyen souvent invoqué n’y change rien. Sans vente conséquente et sans publicité, peut-on parler de presse? La presse était en train de mourir de sa belle mort malgré sa position stratégique de levier de la démocratie et des libertés. Ceux qui connaissent les réalités des médias voyaient venir car le modèle proposé n’ouvrait aucune perspective aux organes et aux journalistes. Les patrons de presse qui se sont lancés dans cette aventure périlleuse l’ont payé tandis que d’autres vivent d’expédients pour survivre. Pendant ce temps les jeunes reporters voient leurs conditions de vie et de travail se dégrader. Ni plan de carrière ni perspective d’avancement ne leur sont proposés. Même pas le minimum vital exigé par la convention collective des journalistes qui n’est en fait qu’un simple plancher.
Si en plus les impôts viennent accabler les organes pour des impôts, cotisations sociales, tva et autres, on mesure la précarité de la presse. Du point de vue de la loi et du code de la presse en particulier, les organes de presse sont des entreprises de presse soumises à certaines obligations. Quelques rares médias arrivent tant bien que mal, à satisfaire ces exigences de la loi. La majorité ne le veut pas et ne le peut pas et sz doit de déposer un bilan. A défaut de le faire, on s’expose à la sanction d’une administration sans état d’âme sur les exigences de la loi.
Que reste-t-il à faire? Engager des négociations pour se pencher sur les misères de la presse, présenter la situation réelle sans faux fuyant, accepter que la presse à toujours vécu sous perfusion face à des lobbies politiques, économiques et idéologiques qui ont toujours tenté de l’utiliser.
Les négociations doivent porter sur toutes les questions présentes et futures qui, si l’on y prend garde, risquent encore d’entraver la vie des entreprises de presse. Les questions à adresser sont tellement nombreuses qu’une seule séance n’y suffirait pas. Mais fort heureusement les assises de la presse dont les conclusions sont en train d’être affinées peuvent servir de termes de référence pour engager de véritables négociations sans perdre du temps. Car le temps presse pour trouver des solutions définitives pour que la presse assume véritablement son rôle de levier de la démocratie sans entrer dans les compromis, compromissions et connivences.
Mamadou KASSÉ, Journaliste