Sa carte postale presque désertique témoigne du quotidien « hostile » dans lequel ses populations évoluent. Zone enclavée, chaleur étouffante , sans eau potable ni électricité. Mais depuis quelque temps , sur la terre de Téourou Boulal, émerge une lueur d’espoir. Une femme intégrée de 5 hectares destiné aux petits producteurs dans la filière lait et symbole de résilience.
Avant la résilience, il faut l’endurance. Le village est sur une piste poussiéreuse et respire un climat sec que les arbres encore debout peinent à oxygéner. Et d’ailleurs, ce n’est pas pour rien qu’à Téourou Boulal, les populations vous accueillent sourire aux lèvres. Une manière sans doute de soulager le visiteur qui a dû affronter une route chaotique pour rejoindre ce village dans le département de Gossas (Fatick). Un sourire pour surtout ouvrir les portes d’un endroit qui fait exception dans la zone. Une ferme clôturée et intégrée de 5 hectares au profit des petits producteurs de la filière lait. À l’intérieur des femmes assises dans le hangar, des agriculteurs sous un arbre pendant que d’autres résistent à la chaleur. Ces derniers labourent la terre et tracent avec leurs doigts des lignes au sol. « L’objectif est d’améliorer les conditions de vie des populations et de réduire leur vulnérabilité face aux changements climatiques », informe Modou Ngom. L’ingénieur agronome à Enda Energie explique que c’est un modèle de développement durable dont la force motrice repose sur le solaire. Des panneaux, au milieu de la ferme, pour l’accès à l’énergie mais surtout au liquide précieux. « L’eau nous soulage et nous permet d’arroser nos récoltes. Auparavant, nous utilisions celle des forages qui dégradait nos récoltes. Aujourd’hui, la situation a changé » se réjouit Sokhna Nanti Diop. L’enthousiasme de la maraichère est partagé par toutes les femmes du village. Les agriculteurs et éleveurs ne diront pas le contraire. Le site, c’est toute une chaîne. Dans l’espace clôturé, des vaches divaguent en quête de pâturages. L’alimentation du bétail, un pilier de l’initiative. La preuve : l’ambition de la ferme intégrée est de produire 800 tonnes de fourrage par an.
« Trois espèces fourragères : maralfalfa, panicum, niébé fourrager ont été testées avec des résultats probants », précise Modou Ngom ingénieur à Enda Energie. Des résultats à booster plaide Amy Ba. L’amatrice de l’ONG à Gossas liste les besoins des femmes productrices fourragères et maraichères. Elle demande le renforcement de la résilience des populations avec un poulailler ou encore un site de stockage. « Pour la dernière récolte, plus de 11 tonnes d’oignons ont été produites. Mais les femmes ont été obligées de brader les prix, faute de stockage » renseigne l’actrice de développement. Au regard de ce qui précède et dans ce contexte de changement climatique, Aissatou Diouf interpelle les politiques publiques. Pour la responsable à l’international d’Enda Energie il y a moyen de faire de l’agriculture autrement autour notamment de l’énergie renouvelable. « Du solaire qui facilite l’accès à l’eau douce, aux bonnes pratiques dans l’intérêt des communautés » ajoute l’experte, aux côtés des femmes dans le hangar. Dehors, deux hommes, septuagénaires, continuent de (re)donner vie à la terre. Ni le poids de l’âge ni la chaleur ne semblent être des obstacles.
Pape Ibrahima NDIAYE, Adama Aïdara KANTÉ et Serigne Saliou DÈME (Photo)