Alioune Souaré, ancien député, dresse un bilan inédit des demandes de levée d’immunité parlementaire au Sénégal, de 1960 à 2025. Ce récapitulatif met en lumière l’évolution de cette pratique au fil des différents régimes, reflétant leurs postures face à la justice et à la responsabilité des élus.
Régime Senghor (1960-1980)
En 20 ans de pouvoir, Léopold Sédar Senghor n’a enregistré aucune demande de levée d’immunité parlementaire. Une période marquée par une gestion rigoureuse de la vie politique, mais aussi par un système centralisé qui a limité les procédures judiciaires contre les élus.
Régime Diouf (1981-2000)
Sous Abdou Diouf, une seule demande a été enregistrée en 20 ans : celle visant le député Joseph N’Dong. Ce cas isolé traduit la continuité du poids de l’État central, tout en ouvrant timidement la voie à la responsabilité judiciaire des parlementaires.
Régime Wade (2000-2012)
L’ère Abdoulaye Wade marque une légère accélération, avec deux levées d’immunité parlementaire : celles des députés Moussa Tine et Alkaly Cissé. Ce tournant reflète une plus grande politisation des procédures, dans un contexte de multipartisme affirmé et de tensions politiques croissantes.
Régime Macky Sall (2012-2024)
Sous Macky Sall, le recours à la levée d’immunité explose. Huit députés ont vu leur immunité levée, parmi lesquels : Oumar Sarr, Ousmane Ngom, Abdoulaye Baldé, Khalifa Sall, Barthélemy Dias, Ousmane Sonko, Boubacar Biaye et Mamadou Sall. Ce chiffre record témoigne d’un durcissement des relations entre justice et élus, mais aussi de l’effervescence des affaires politico-judiciaires.
Régime Diomaye (2024 à nos jours)
À ce jour, sous l’actuel régime de Bassirou Diomaye Faye, une seule demande de levée d’immunité a été effectuée, visant Farba Ngom, député influent. Cette première affaire pourrait annoncer une nouvelle ère, à surveiller de près.
En 65 ans, 12 demandes de levée d’immunité parlementaire ont été enregistrées, avec une nette accélération à partir des années 2000. Ces chiffres traduisent les mutations du paysage politique sénégalais, où l’immunité parlementaire devient de plus en plus contestée face aux exigences de transparence et de justice.