Cerelac et Nido, deux des marques d’aliments pour bébé les plus vendues par Nestlé dans les pays à faibles et moyens revenus contiennent des niveaux élevés de sucre ajouté, alors que ce n’est pas le cas dans des pays développés. Telles sont les principales conclusions d’une enquête menée par Public Eye et le Réseau international d’action pour l’alimentation infantile (Ibfan). Au Sénégal, le volume de sucre ajouté est de 5,9 grammes. Alors que L’Oms prévient que l’exposition au sucre dès le plus jeune âge augmente le risque de développer l’obésité et d’autres maladies chroniques telles que le diabète ou l’hypertension. Le Journal Bès bi Le jour lève un coin du voile de cette enquête.
«Nestlé ajoute du sucre au lait pour bébé et aux céréales tels que Cerelac et Nido dans les pays les plus pauvres». C’est ce qu’a révélé un rapport publié, mercredi, par «Public Eye», un organisme de surveillance basé à Zurich et le Réseau international d’action pour l’alimentation infantile (Ibfan). Les résultats des tests réalisés sur 150 produits dans des pays différents ont montré que presque toutes les céréales à base de blé Cerelac de Nestlé dans ces régions, destinées aux nourrissons à partir de six mois, contenaient des sucres ajoutés équivalant en moyenne à 4 grammes par portion, soit un morceau de sucre. Le volume le plus élevé de sucre ajouté à un produit, soit 7,3 grammes par portion, a été détecté aux Philippines, suivi de 6,8 grammes au Nigeria et de 5,9 grammes au Sénégal. Par ailleurs, les produits laitiers en poudre Nido destinés aux enfants de 1 à 3 ans contenaient près de deux grammes de sucre ajouté par portion.
Au Sénégal, c’est 0,5 gramme de sucre ajouté dans les laits en poudre Nido pour enfants à partir d’un an. L’enquête montre que, «pour Nestlé, tous les bébés ne sont pas égaux en matière de sucre ajouté». Alors qu’en Suisse, où la société a son siège et les pays développés, les principales marques de céréales infantiles et de laits de croissance vendues par le géant agroalimentaire sont exemptes de sucre ajouté. «Un tel double standard est injustifiable», a réagi un scientifique à l’Organisation mondiale de la Santé (Oms), Nigel Rollins. Pour lui, le fait que Nestlé n’ajoute pas de sucre à ces produits vendus en Suisse, mais soit tout à fait disposé à le faire dans des pays où les ressources sont plus faibles, est «problématique, tant d’un point de vue éthique que de santé publique».
Risque des maladies chroniques telles que le diabète ou l’hypertension pour les enfants
Le marketing de Nestlé promeut Cerelac et Nido comme des marques dont l’objectif est d’aider les enfants à «mener une vie plus saine». Enrichis en vitamines, minéraux et autres micronutriments essentiels, ces produits seraient, selon la multinationale, spécialement conçus pour répondre aux besoins des bébés et enfants en bas âge. Ils contribueraient à renforcer leur croissance, leur système immunitaire et leur développement cognitif. L’étude montre que si Nestlé communique volontiers sur les vitamines, minéraux et autres nutriments contenus dans ses produits, elle ne fait pas preuve de la même transparence concernant le sucre ajouté. Les pédiatres et experts en nutrition infantile interrogés par Public Eye dénoncent ces pratiques qui s’avèrent dangereuses. «C’est extrêmement préoccupant. Le sucre ne devrait pas être ajouté aux aliments destinés aux bébés et aux jeunes enfantsparce qu’il est inutile et a un fort pouvoir addictif. Les enfants rechercheront des aliments de plus en plus sucrés, amorçant un cycle négatif qui augmente le risque de troubles liés à l’alimentation à l’âge adulte, comme l’obésité, ainsi que d’autres maladies chroniques telles que le diabète ou l’hypertension», déplore un épidémiologiste. L’Oms a également prévenu que l’exposition au sucre dès le plus jeune âge peut créer une préférence pour les produits sucrés tout au long de la vie, ce qui augmente le risque de développer l’obésité et d’autres maladies chroniques. Depuis 2022, elle appelle à l’interdiction des sucres ajoutés dans les produits destinés aux bébés et aux jeunes enfants de moins de trois ans. Ces révélations interpellent les autorités sanitaires du Sénégal à renforcer davantage le contrôle sur les produits destinés aux enfants. D’ailleurs, une pétition a été lancée pour exiger à Nestlé de mettre fin à ce «double standard injustifié et nuisible».
Fodé B. CAMARA