La situation au Mali atteint un niveau critique. Depuis plusieurs semaines, un blocus imposé par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), affilié à Al-Qaïda, asphyxie le pays, provoquant une pénurie de carburant et de produits essentiels, paralysant l’économie et plongeant les populations dans une détresse profonde. Ce siège silencieux aggrave une crise déjà nourrie par des années d’instabilité politique et de violences armées, menaçant non seulement le Mali, mais toute la sous-région sahélienne.
À Bamako et dans plusieurs régions, les convois de carburant sont régulièrement attaqués, les écoles restent fermées, et l’accès à l’électricité et aux services de base se réduit drastiquement. Le gouvernement malien a dû militariser les axes routiers et escorter des centaines de camions-citernes, provenant notamment du port de Conakry, pour éviter un effondrement économique total. Malgré ces efforts, la population subit des files interminables dans les stations-service et une flambée des prix, tandis que la junte dirigée par Assimi Goïta peine à maintenir un semblant de contrôle territorial et à assurer la sécurité.
Le JNIM, désigné par l’ONU comme « la menace la plus importante dans le Sahel », poursuit une stratégie de pression visant à délégitimer le régime militaire et à se positionner comme une alternative crédible. Le groupe impose son autorité dans plusieurs zones, collecte des taxes et rançons, et tente d’étendre son influence tout en paralysant l’économie nationale. Selon les experts, l’objectif stratégique est de faire tomber la junte et d’imposer un gouvernement susceptible de négocier avec lui, fragilisant ainsi le pouvoir central.
Face à cette crise, la communauté internationale s’inquiète. L’Union africaine a exprimé sa « profonde préoccupation » et condamné fermement les violences et les enlèvements, tandis que les États-Unis et le Royaume-Uni ont annoncé le retrait de leur personnel non essentiel. Les analystes régionaux avertissent que l’effondrement du Mali aurait des conséquences directes sur les pays voisins; Burkina Faso, Niger, Mauritanie et même le Sénégal, fragilisant tout le Sahel et menaçant la stabilité régionale.
Les tentatives de dialogue entre la junte et le JNIM apparaissent comme un ultime recours, mais elles restent risquées. Les négociations pourraient compromettre le narratif officiel de lutte contre le terrorisme et affaiblir davantage le pouvoir en place. Parallèlement, la dépendance structurelle du Mali aux importations de carburant, désormais militarisées et parfois approvisionnées par la Russie, expose la vulnérabilité du pays et la fragilité de son économie.
Le contexte humanitaire est également alarmant. La population, déjà éprouvée par l’insécurité et la pauvreté, doit désormais faire face à des pénuries alimentaires et à des services de santé insuffisants. Les ONG locales et internationales peinent à acheminer l’aide humanitaire, contraintes par les risques sécuritaires et les contrôles des zones occupées par les groupes armés. La situation exacerbe les tensions sociales et la méfiance envers le gouvernement, fragilisant davantage l’autorité de l’État.
Enfin, le spectre d’une crise migratoire plane sur la région. L’asphyxie économique et l’insécurité accrue poussent de plus en plus de Maliens à tenter de rejoindre les pays voisins ou l’Europe, aggravant les pressions sur les infrastructures et les politiques migratoires régionales. Une telle dynamique pourrait transformer la crise malienne en un défi transfrontalier majeur, nécessitant une coordination urgente entre les États du Sahel et la communauté internationale pour éviter un effondrement humanitaire et sécuritaire aux conséquences régionales.
Au-delà de Bamako, c’est tout l’équilibre du Sahel qui est en jeu. La situation malienne n’est plus une crise nationale, mais un défi continental : si le Mali sombre, c’est la stabilité régionale et l’avenir collectif de l’Afrique de l’Ouest qui vacilleront. Le temps presse pour une réponse coordonnée et solidaire, impliquant l’UA, la CEDEAO et les pays voisins, afin d’éviter que l’incendie malien ne se propage au reste de la région.
Emedia









