Derrière l’aspect impeccable des pelouses marocaines se cache un travail de longue haleine, précis et hautement technique. À Bougdour, près de Tanger, le Maroc s’appuie désormais sur une pépinière géante de gazon naturel, unique par son ampleur dans le pays et sur le continent africain. Ce site stratégique alimente les stades accueillant la Coupe d’Afrique des nations (CAN) et se prépare déjà aux exigences des futurs grands rendez-vous du football mondial.

Située à Bougdour, un village rural de la périphérie Est de Tanger, à proximité de Chraka et d’Aïn Bellouth, cette vaste étendue verte n’a rien d’un champ agricole ni d’un projet touristique. S’étendant sur près de 12 hectares, soit l’équivalent de plus de 17 terrains de football aux normes internationales, la pépinière de Bougdour est dédiée à la production de gazon sportif de très haut niveau. On y cultive notamment le Paspalum TE Platinum, une variété premium devenue la référence des stades marocains.
Ce gazon, particulièrement prisé à l’échelle internationale, est reconnu pour sa résistance à la chaleur, à la salinité de l’eau, au piétinement intensif et pour sa densité élevée. Autant de qualités indispensables pour répondre aux critères stricts imposés par la FIFA et la CAF, qui ont d’ailleurs salué la qualité exceptionnelle de cette production locale.

Ingénieur agronome et responsable du gazon du Grand stade de Tanger, Ismaël Amrani explique que cette pépinière joue un rôle central dans l’alimentation des stades.
« Elle nous permet de disposer, à tout moment, d’un gazon prêt à être utilisé, que ce soit pour des remplacements localisés ou pour l’approvisionnement complet de certains terrains », souligne-t-il.
À ce jour, quatre stades de la CAN ont été alimentés depuis Bougdour : le Grand stade de Tanger, le stade Moulay Abdallah, le stade Moulay El Hassan et le stade Al Barid.

La production d’un gazon mature, bien enraciné et pleinement opérationnel nécessite en moyenne cinq à six mois, un délai qui peut être réduit à quatre mois en période de production intensive. Le climat marocain, marqué par une grande diversité régionale, impose une gestion fine des variétés, des programmes de fertilisation et surtout de l’irrigation, considérée comme un levier clé face aux défis du changement climatique.
Le principal enjeu reste la synchronisation entre la production en pépinière et les besoins des stades. Anticipation, flexibilité et capacité à faire face à l’imprévu sont essentielles pour garantir des terrains parfaitement nivelés, sûrs pour les joueurs et irréprochables sur le plan esthétique. Les critères ne sont pas seulement agronomiques : la qualité du rebond, la traction et la sécurité des joueurs entrent également en ligne de compte.
Pour assurer un drainage optimal, le site utilise un sable siliceux à granulométrie spécifique, conforme aux exigences de la FIFA et de la CAF. Ce matériau peut être importé ou fourni localement, selon les besoins. Quant à la durée de vie d’une pelouse complète, elle peut atteindre dix à quinze ans, comme c’est le cas au Grand stade de Tanger, grâce à des rénovations ciblées plutôt qu’à des remplacements intégraux.

Ce savoir-faire 100 % marocain, porté par l’entreprise Sport Turf Maroc, est le fruit de l’expérience et de l’adaptation aux différents climats du pays. Une expertise aujourd’hui reconnue, y compris par les joueurs. Plusieurs internationaux engagés dans la CAN ont salué la qualité des terrains, à l’image de l’attaquant sénégalais Chérif Ndiaye ou de Krépin Diatta, qui ont qualifié la pelouse du Grand stade de Tanger d’excellente.
Si l’objectif immédiat reste la réussite de la CAN, les équipes de Bougdour se projettent déjà vers l’avenir. Fort de cette expérience, le Maroc entend encore élever ses standards afin d’être prêt à offrir, le moment venu, une Coupe du Monde à la hauteur des meilleures références mondiales.
Reportage réalisé par Assane BA ,Serigne Saliou Dème et Tidiane sy envoyés spéciaux au Maroc






