Lorsque les barrières qui retenaient prisonnier mon client Ousmane Sonko, par ailleurs leader de parti qui cristallise les aspirations de tout un peuple et au-delà une vision africaine, il y’avait plusieurs interrogations auxquelles une seule réponse devait s’imposer à tous.
L’Etat a toujours été cohérent dans sa logique qui est celle d’empêcher le leader de l’opposition de pouvoir un jour devenir président de la République du Sénégal pour mettre en œuvre son programme qui se résume à la reddition des comptes, la bonne gouvernance, l’éradication des compradors, l’indépendance économique et la rupture définitive avec l’asservissement et le capital mondial.
Les plus naïfs s’attendaient à un apaisement et en la normalité qui seraient de permettre à tous les aspirants à la fonction présidentielle de participer aux élections de 2024, le peuple souverain devant faire son choix. C’était mal analyser les événements et connaître la détermination du système qui est en conflit avec la démocratie et l’Etat de droit.
Les plus rationnels s’attendaient à l’exécution de la fausse contumace, puisque Ousmane Sonko n’a jamais été un fugitif d’autant que les forces de défense et de sécurité l’avaient kidnappé en rase campagne, alors qu’il avait quitté Ziguinchor pour se rendre à Dakar et que la Chambre Criminelle n’avait pas encore rendu son jugement.
Cependant, l’Etat a toujours versé dans l’irrationnel et c’est pourquoi cela ne devrait pas surprendre lorsqu’il ne peut se satisfaire d’un simple délit, alors que tout un arsenal juridique est à sa disposition pour détruire à la fois l’homme et son parti et que la confusion des pouvoirs le lui permettait.
Ce qui est surprenant, c’est l’insolence du procédé, à savoir l’intervention d’un élément que l’on dit être du corps des forces de défense et de sécurité comme provocateur, pour accuser tout un symbole de vol d’un portable dont la valeur monétaire est dérisoire et partant de là, viser un cumul d’infractions qui ne relèvent pas des faits.
Celà pue le complot à mille lieux, un complot encore mal cogité, mal exécuté, indigeste et le monde n’est pas dupe.
La communication du procureur de la République est à la fois un réquisitoire écrit et un jugement de condamnation sans Appel.
Le style de rédaction et le discours portent gravement atteinte à la présomption d’innocence, au procès équitable et, de mémoire, avec mes 40 ans d’exercice de la profession d’avocat, je n’ai aucun souvenir du respect par l’Etat du Sénégal des décisions le condamnant pour violation des droits de l’homme.
Le fardeau porté par le procureur de la République est très lourd de conséquences, mais le Président de la République qui a toujours été le seul maître à bord peut encore tout arrêter alors qu’il est temps, car, si le procureur de la République a l’opportunité des poursuites, sa plume est serve.
Il est à rappeler que le procureur de la République n’incarne pas le pouvoir judiciaire qui doit toujours être jaloux de son indépendance et marquer ses distances avec les autres pouvoirs.
Aucun réquisitoire ne peut dévêtir un juge de son indépendance et le pouvoir doit arrêter le pouvoir. Il est temps que le pouvoir judiciaire marque et réaffirme de son empreinte son indépendance.
L’arrestation d’Ousmane Sonko qui a fait savoir qu’il n’acquiesçait au jugement, a anéanti de plein droit ce dernier et lui restitue l’ensemble de ses droits civiques.
Le Sénégal qui a une position géostratégique très enviable est une plateforme dont l’équilibre doit être à tout prix préservé, de sorte que la situation interpelle une réaction rapide et sans complaisance de l’ensemble de la communauté internationale, la CEDEAO et l’Union Africaine au premier rang.
La libération immédiate de Ousmane Sonko, de tous les membres du directoire de son parti, de toutes les personnes poursuivies pour des infractions politiques, est une exigence sociale.