Il reste à la Direction générale des élections (Dge), mais à sa tête. Biram Sène, 42 ans, jusqu’ici Directeur de la Formation et de la communication, est le premier magistrat à occuper cette fonction. Portrait de l’enfant de Thiaba, dans la commune de Mbellacadiao, un assoiffé de connaissances.
Le Sénégal s’achemine vers sa première élection présidentielle avec un parrainage citoyen qui met partis et indépendants sur le même pied. Le 19 avril 2018, l’Assemblée nationale est chauffée, avec une série d’arrestations d’opposants et d’activistes qui protestaient contre cette loi qui ne fait pas l’objet de consensus. L’on soupçonne, d’ailleurs, une autre astuce pour éliminer des candidats. La vérification et le contrôle sont confiés au Conseil constitutionnel. Mais beaucoup ne veulent plus se fier à la «sagesse» des… sages. Du filtre, il n’en reste que 5 candidats qui vont s’affronter. Alors, pour rassurer et montrer sa bonne foi, le président du Conseil constitutionnel, Papa Oumar Sakho entreprend une campagne de communication et de confiance avec les médias à Saly, les 25 et 26 juillet. Démonstration du fichier et explications de la procédure. Biram Sène était à l’époque parmi les assistants du Conseil avec son inséparable ami, Adama Traoré. Au tableau, devant Pr Babacar Kanté ou encore Ndiaw Diouf, le nouveau Directeur général des élections (Dge) séduit par sa pédagogie et sa maitrise du système (fichier et parrainage). Le Cv de ce magistrat n’échappe pas à la Dge où il est nommé à ce stratégique poste de Directeur de la Formation et de la communication, après les «savants» de la matière électorale, Bernard Casimir Demba Cissé et Macoumba Koumé, tous les deux magistrats comme Biram Sène. Ne remplace pas Thiendella Fall qui veut ! En dépit des nombreuses critiques, à tort ou à raison, le Dge sortant a été l’un des acteurs des alternances politiques à diverses responsabilités.
Lorsqu’il déposait son dossier à la Dge… La leçon inaugurale de 2016
Biram Sène est connu pour sa « perspicacité, sa persévérance ». C’est une personne qui le connaît bien qui témoigne de «son sens du travail » et de « son goût du savoir ». Ce proche dit : «C’est une personne très rigoureuse, honnête et très sérieuse dans ce qu’il fait. Lorsqu’il déposait son dossier pour le poste de Directeur de la formation et de la communication de la Dge, il avait dit au commissaire Papa Faye, le fils de son homonyme qui lui avait demandé de postuler, qu’en tant que substitut du procureur, il n’avait pas beaucoup de choses à faire», témoigne-t-il. C’est que ce jeune était parti pour siéger dans les hautes sphères de l’Etat comme ce choix porté sur le Substitut du Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Dakar qu’il était pour prononcer le discours d’usage de l’Audience solennelle de Rentrée des cours et tribunaux, le 12 janvier 2016. Avec l’éloquence de grands avocats, il traite du thème «Les collectivités locales et le contrôle de légalité». Peut-être bien que le « Code général des collectivités territoriales annoté», qu’il a coécrit avec Léopold Wade, en 2023, publié aux éditions L’Harmattan Sénégal, est une suite logique ! Et ce n’est pas son seul livre.
«C’est presque une bibliothèque ambulante !»
C’est que l’homme est un bosseur ! Curieux de tout. C’est pourquoi il a écrit sur plusieurs sujets. Et enseigne presque partout parce que titulaire d’un D.E.A. en Droit public général, chargé de cours à la Faculté des Sciences juridiques et politiques de Dakar, à l’École supérieure polytechnique (Esp) de Dakar et à l’École nationale de Police… «Biram Sène, c’est presque une bibliothèque ambulante !», soupire un juriste qui rappelle ses publications. «Le contentieux administratif : Essai de liste des actes susceptibles et des actes insusceptibles de recours pour excès de pouvoir» en mai 2024. Avec son ancien collègue et presque inséparable, Adama Traoré, magistrat devenu avocat, il a publié un recueil de plus de 1000 pages pour rendre moins pénible l’accès à la législation foncière et domaniale avec «Recueil de textes fonciers et domaniaux», 1ère Edition 2013 et 2e édition publiée en 2019 préfacées par Pr Abdoulaye Dièye. Il revient avec Adama Traoré avec «Code électoral annoté, 2024», L’Harmattan Sénégal, précédé de «Code des douanes du Sénégal annoté», édition 2022, avec Adama Traoré et Dr Malick Faye. En 2018, il publie avec Amadou Dicko Mballo et Mamadou Birane Wane, «Justice militaire, recueil de textes annoté», préfacé par le Général Meissa Niang et édité par la maison d’édition ABIS…
De Thiaba à Dakar
Originaire de Thiaba, dans la commune de Mbellacadiao, une collectivité territoriale du département de Fatick, ce sérère bon teint a fait ses études au lycée Valdiodio Ndiaye de Kaolack où il a obtenu son bac avant d’être orienté à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Il a son idée sur le système électoral. «Le processus électoral sénégalais, bien que cité en exemple, n’est, en effet, pas parfait. Ses constants efforts pour émarger au niveau des standards internationaux en matière de transparence et de sincérité, semblent être, sinon ignorés de la part d’une classe politique et de citoyens toujours plus exigeants», avait-il déclaré aux participants de l’atelier sur le système électoral organisé le week-end dernier par le Forum civil.
Ses convictions sur le parrainage, les partis politiques…
Biram Sène portera la Dge donc au moment où le Sénégal pourrait passer au modèle indépendant avec une Ceni qui se chargera du processus électoral, donc sans dépendre du ministère de l’Intérieur. Ou alors un modèle plutôt mixte. Biram Sène a ses idées sur les partis politiques par exemple qui seront «bientôt 400» et «un parrainage qui est un système qui n’est pas mauvais mais qu’il faut parfaire», comme il l’a dit le week-end dernier. En connaissance de cause ! Parce qu’avec Adama Traoré, l’autre magistrat avec qui il était auditeur et membre du Service de documentations et d’études au Conseil constitutionnel, ils ont inauguré l’air du parrainage citoyen en 2019 et étaient au front pour expliquer le processus de vérification après de multiples critiques des hommes politiques et des réserves de la société civile. Voilà pourquoi, d’ailleurs, il milite pour la délocalisation de la Commission de vérification et de contrôle du parrainage pour l’élection présidentielle qui «fragilise» l’institution. Et l’expose. Il ne détermine pas la politique en matière électorale, mais Biram Sène est dans son dada.
Malick SY
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