À 86 ans, Biram Senghor refuse le silence et l’oubli. Le fils de Mbap Senghor, tirailleur sénégalais tué lors du massacre de Thiaroye en 1944, a déposé, mardi 24 juin, une plainte contre X et contre l’État français pour « recel de cadavres ». Cette initiative inédite intervient sept mois après la reconnaissance officielle, par la France, de ce crime colonial qui a coûté la vie à des dizaines de soldats africains – officiellement 35 morts, mais jusqu’à dix fois plus selon certains historiens.
Le massacre de Thiaroye, survenu au Sénégal – alors colonie française – le 1er décembre 1944, est un épisode longtemps passé sous silence dans l’histoire coloniale française. Il visait des tirailleurs sénégalais qui réclamaient simplement le paiement de leur solde à leur retour d’Europe, après avoir combattu pour la France durant la Seconde Guerre mondiale. La répression fut brutale et sanglante.
La plainte, enregistrée au parquet de Paris, vise des faits de « recel de cadavres », infraction définie à l’article 434-7 du Code pénal français. Elle met en cause la responsabilité civile de l’État français dans la dissimulation des corps des victimes et leur inhumation clandestine, sans identification ni restitution aux familles.
Biram Senghor est représenté par Me Mbaye Dieng, avocat au barreau du Sénégal, dont le cabinet est basé à Dakar. Conformément à la convention de coopération judiciaire franco-sénégalaise du 29 mars 1974, l’avocat a élu domicile en France pour cette procédure. Il est assisté par Me Julia Rechtman, avocate au barreau de Paris.
Au-delà de l’acte juridique, cette plainte s’inscrit dans une volonté de faire émerger la vérité historique et de réclamer justice pour les descendants des tirailleurs. Elle ravive également le débat sur les réparations et la reconnaissance pleine et entière des crimes liés à la colonisation.
Emedia