Diodio Gueye fait partie des cinq rescapés. Il nous raconte le film de cette tragédie qui a frappé la ville de Mbour. Âgé de 20 ans, ce jeune tailleur habitant le quartier Tefess à dû nager sur une distance d’un kilomètre avant d’être sauvé.
Ce dimanche 8 septembre restera à jamais dans la mémoire des populations de Mbour. Des candidats à l’émigration ont vu leur pirogue prendre eau et chavirer alors qu’elle s’apprêtait à prendre le large.
« C’est à 14 heures que nous nous sommes rassemblés. De petites pirogues devaient, par groupes de vingt, nous transporter vers l’embarcation. Vers 17 heures 30 alors que nous apprêtions à partir, la pirogue a pris eau. Elle avait beaucoup de trous et n’était pas grande. En plus des passagers il y avait beaucoup de nourriture dans la pirogue.
Tout le monde s’est précipité pour aller d’un côté et l’embarcation a chaviré », nous confie Diodio. « Je fais partie des premiers rescapés cueillis par des piroguiers. Ce qui m’a sauvé, c’est que je sais nager. Malheureusement, je ne pouvais rien faire pour tous mes amis que je voyais mourir, tomber comme des roches parce qu’ils ne savaient pas nager. Dans la pirogue, il y avait des footballeurs, des éléves, des maçons. …
La plupart des passagers habitent le quartier Thiocé parce que le capitaine habite ce quartier. Je voyais tout un monde périr dans l’eau. Toutes les cinq femmes qui étaient à bord de la pirogue sont mortes. Jusqu’à présent, ces folles images me reviennent. Je n’arrive pas à dormir d’un sommeil paisible. Même le cri d’un chat la nuit me fait peur. Je n’ai jamais fumé de cigarettes. Mais avec ce drame, j’ai commencé à en griller », nous confie Diodio Gueye qui nous parle de son jeune frère qui est aussi rescapé.
« Moi j’ai les pieds enflés. Je souffre énormément. J’étais accompagné de mon frère cadet Cherif. Mais lui est en proie à des troubles mentaux. Il a très peur et est toujours sous le choc et ne fait que crier. Nous demandons du soutien de la part des autorités pour une prise en charge », ajoute Diodio qui regrette d’avoir tenté cette aventure.
« Quand on vit avec sa maman et voit qu’elle n’a même pas de quoi acheter du sucre, on peut être tenté d’aller à l’aventure pour l’aider. Mais de cette épreuve, je tire la leçon que cela ne vaut pas la peine de se suicider. Et je ne conseillerai jamais à un jeune de prendre la pirogue pour voyager », conclut Diodio.
Aboubakry KANE