Je cherchais un communiqué ou manifeste qui justifie la journée sans presse et je suis tombé sur l’édito publié hier dont la chute explique les raisons de cette grève.
Nul ne peut ignorer le rôle de la presse dans la démocratie et surtout dans la trajectoire de notre démocratie sénégalaise. C’est une lapalissade de le dire mais le rappel est toujours important.
Seulement les faits ici rapportés sont des actes de justice qui ne peuvent êtres sans fondements. En plus ils sont liés à la politique fiscale qui relève de la loi qui permet aussi la possibilité de recours et de négociation de moratoires. Surtout que dans ce cas précis il s’agit essentiellement de la TVA collectée pour transmission et des obligations sociales au bénéfice des employés.
Les finances publiques sont au cœur de la démocratie et la fiscalité garantie la viabilité de l’état et exige le devoir du citoyen de contribuer à la mobilisation des ressources nécessaires aux investissements collectifs. La justice et l’équité fiscales supposent que tous les contribuables paient leurs parts d’impôt et exigent que les ressources mobilisées soient dépensées au profit du bien-être des populations. Elle suppose aussi une fiscalité progressive qui protège les plus vulnérables et ponctionne plus chez les plus forts.
Nous avons encore des efforts à faire dans ce sens, mais Il n’est pas convenable de soutenir un mouvement coorporatiste contre un devoir citoyen et contre le principe d’égalité de tous devant la loi. La loi étant de portée générale et impersonnelle.
Toutes les entreprises et activités commerciales doivent payer leur part d’impôts selon les termes de la loi.
Les entreprises de presse sont parmi celles qui bénéficient déjà du soutien des contribuables à travers les subventions budgétaires octroyées et les remises fiscales accordées en 2021. En effet «la loi de finances 2021 avait consacré l’exonération du paiement des taxes et impôts pour toute l’année 2021, permettant aux entreprises de presse de retrouver une «virginité fiscale» jusqu’au 31 décembre 2021. »
Si ces mesures se sont avérées insuffisantes pour permettre aux médias de survivre et surtout de sauvegarder des emplois et continuer à jouer pleinement leur rôle dans notre quête démocratique, il est aujourd’hui important d’organiser un dialogue citoyen franc pour adopter des mesures fiscales spécifiques pour la promotion du secteur tel que c’est le cas pour le secteur du tourisme par exemple ou pour promouvoir les exportations.
Compte tenu des catégories d’impôts en question le problème des entreprises de médias semble plutôt être ailleurs dans l’environnement des affaires et le modèle économique qui permet d’assurer leurs performance et leur viabilité. Ce qui suppose une réflexion stratégique pour créer les conditions d’adaptation des médias traditionnels aux défis de l’heure et permettre leur compétitivité face à la concurrence de nouvelles sources d’informations.
Par ailleurs il devient apparent que les rapports entre la presse et la politique doivent être assainis dans le sens des enseignements du regretté Mame Less Camara qui dans sa quête d’une presse libre et indépendante mettait en garde sur l’attitude de l’homme de médias : « Travailler avec indépendance et rigueur face à tout groupe de pression, sans agression aucune contre les fondements de l’unité nationale sans parti pris de nature à porter atteinte au droit à la différence ».
Face à la vulnérabilité d’un secteur professionnel aussi important, l’Etat doit adopter une approche d’ouverture et de dialogue pour trouver des arrangements immédiats et des solutions durables pour la survie de notre presse.
Vive la presse, catalyseur des dynamiques démocratiques, dans l’éthique de la responsabilité citoyenne.
Élimane Haby KANE (Legs Africa)