Le 22 novembre, c’est discrètement que l’ancien président sénégalais Macky Sall a quitté son hôtel parisien pour se rendre à la résidence officielle ivoirienne du 16ᵉ arrondissement. Reçu dans un hôtel particulier récemment rénové, il a longuement échangé avec le président ivoirien Alassane Ouattara. Pendant plus de deux heures, les deux hommes ont disséqué la situation politique à Dakar, marquée par les tensions persistantes entre le président Bassirou Diomaye Faye et son premier ministre Ousmane Sonko.
En coulisses, Macky Sall, encore loin d’avoir tourné la page, ne manque pas d’adresser quelques piques à son ancien adversaire Sonko, devenu depuis chef du gouvernement.
Alassane Ouattara, lui, s’affirme désormais comme un soutien assumé du président Faye, notamment dans le bras de fer en cours avec le Fonds monétaire international. Dakar et le FMI discutent d’un nouveau programme après la suspension de l’ancien, gelé lorsque des divergences substantielles avaient été révélées entre les chiffres de la dette fournis sous l’ère Macky Sall et la réalité comptable du pays. Selon les projections du FMI, cette dette devrait atteindre 132 % du PIB fin 2024.
Pour Abidjan, l’issue de ces négociations dépasse largement le cadre sénégalais. Ouattara plaide activement auprès de ses partenaires, dont Emmanuel Macron, pour éviter une restructuration de la dette du Sénégal, un scénario jugé dommageable pour la stabilité déjà fragilisée de l’UEMOA et pour la crédibilité du franc CFA. Une partie des cadres du FMI estime pourtant qu’une restructuration serait indispensable pour assurer la soutenabilité à long terme des finances sénégalaises.
Cette implication croissante du président ivoirien dans les dossiers de Dakar irrite fortement Ousmane Sonko. Contrairement à Bassirou Diomaye Faye, le premier ministre se montre peu disposé à s’investir dans les négociations avec les bailleurs traditionnels. Sonko cherche plutôt à réorienter les partenariats financiers vers les pays du Golfe. C’est d’ailleurs dans cette optique qu’il s’est envolé pour les Émirats arabes unis le 22 novembre à bord d’un jet privé, alors même que le président Bassirou Diomaye Faye représentait le Sénégal au sommet UA–UE en Angola, rompant avec la règle voulant qu’un membre de l’exécutif reste sur le territoire.
Dans l’entourage de Sonko, on soupçonne désormais Alassane Ouattara de vouloir obtenir directement le soutien du président Diomaye afin de desserrer la pression autour de Macky Sall, après avoir échoué à convaincre le premier ministre. Le chef de l’État ivoirien avait d’ailleurs déjà appelé Sonko à la mansuétude envers l’ancien président, dont plusieurs proches sont ciblés par la justice pour des affaires présumées de corruption.
Lors d’une visite à Abidjan en mai 2025, Sonko avait assuré qu’il appellerait Macky Sall pour renouer le dialogue. L’appel n’a finalement jamais eu lieu. Les échanges se poursuivent toutefois, mais uniquement par l’intermédiaire d’un ami intime du fils aîné de Macky Sall, un homme d’affaires très proche d’Ousmane Sonko depuis l’enfance.
Source : Africa Intelligence







