Le 9 février dernier, le prévenu M. Ndiaye faisait partie des jeunes qui manifestaient contre le report de la Présidentielle. Mardi, cet enseignant était à la barre du tribunal de grande instance de Mbour pour «actes et comportements compromettant la sécurité publique, rassemblements illicites et dégradation de biens publics».
Ce mardi 20 février 2024, beaucoup d’élèves et d’enseignants ont boudé les classes pour aller au tribunal soutenir l’un des prévenus M. Ndiaye, leur professeur d’espagnol au nouveau lycée de Mbour. Son arrestation fait suite à des manifestations aux-quelles il a pris part et qui ont occasionné des actes de vandalisme. Une station d’essence a été incendiée, des biens d’autrui détruits. «Le 9 février, j’ai participé à la caravane dans le cadre de la campagne électorale. Mais les problèmes ont commencé quand la Police s’est mise à nous charger. Et en plus, tout le monde sait qu’il y a des nervis à Mbour aux-quels nous faisions face», a déclaré le prévenu. Le jour des faits, Senior Ndiaye tenait à la main une bouteille d’essence pour, dit-il, «brûler des pneus et résister aux nervis».
Une attitude qui lui a valu des remontrances de la part du tribunal. «Vous avez posé un acte de défiance parce qu’il y avait un décret reportant l’élection présidentielle. Même si on n’est pas d’accord on doit s’y conformer. Quelle que soit la situation, vous ne devez pas vous donner en spectacle, en tant qu’enseignant. Il y a sûrement des médecins, des avocats, des magistrats qui pensent comme vous mais ne se sont pas donnés en spectacle», souligne le Président du tribunal.
Le procureur : «Il est vrai que ces temps-ci la démocratie est malmenée dans notre pays»
Le prévenu argue qu’il pensait être en droit de battre campagne et de se défendre des nervis en précisant qu’il avait récupéré la bouteille d’essence d’un enfant. «Il est vrai que ces temps-ci la démocratie est malmenée dans notre pays par les politiciens de tous bords. Mais ce n’est pas une raison pour tout détruire. La preuve, la décision qui avait occasionné les manifestations a ensuite été annulée grâce à des recours», déclare le procureur. Embouchant la même trompette que le Président, il ajoute que «le prévenu a posé un acte indigne d’un enseignant qui doit donner un bon exemple à ses élèves».
Senior Ndiaye présente ses excuses et dit regretter son acte
«Je me réjouis de la pédagogie dont vous avez fait preuve. Je vais taire certains aspects de la procédure pour dire simplement que beaucoup de dossiers ont été classés sans suite pour l’équilibre social et la paix, contrairement à celui de mon client. Il y a les rigueurs de la loi, mais aussi le droit à la dissidence. Or, notre liberté est bâillonnée par la Police, ce qui n’est pas normal dans un État de droit. Néanmoins, mon client a compris qu’il ne faut pas franchir certaines limites. Je vous demande de lui permettre de retrouver ses élèves», a plaidé l’avocat de la défense Me Sakho. Le prévenu, qui a présenté ses excuses et regretté son acte, a écopé de deux mois de prison avec sursis.
Aboubacry KANE